Qui sème le vent, récolte…

Sous le vent

À l’Est de la Crète, le vent est partout. Il se lit dans la forme des oliviers, dont les branches semblent prendre leur élan. Il justifie les éoliennes gigantesques qui surplombent les crêtes de Karidi. Il donna l’idée à la championne française de planche à voile Nathalie Simon d’ouvrir un club à Palekastro, à quelques kilomètres, depuis repris par des Autrichiens forts sympathiques dont on se demande toujours comment leur est venue cette passion marine.



En passant sur le plateau entre Azokeramos et Kelaria, on aperçoit un petit métochi, abri fidèle dont je vous ai glissé une photo ci-dessous. Mon oncle Kostas raconte qu’enfant, quand il arrivait pieds nus sur le plateau, il se mettait à courir à toutes jambes pour échapper aux bourrasques terrifiantes. Quand on le rencontre pour la première fois, on est ahuri.e par sa force. J’ai en mémoire l’image de ma petite soeur Juliette, âgée de trois ou quatre ans, qui, au sommet de la montagne de Skinia, se laissait tomber en arrière mais était miraculeusement portée par le vent venu de la mer. Et il n’est pas rare en effet au mois d’août, après quinze jours de rafales furieuses, d’assister à de véritables rixes entre les habitants pourtant paisibles d’Adravasti. Le vent rend fou aussi sûrement qu’il couche les arbres ou érode les paysages.

Mon père prétend même qu’Aristophane aurait écrit que tous les vents de la Crète passent par le chas de Zakros…


La plupart du temps, j’aime ce vent grec. Surtout le Meltemi, le vent du Nord, celui qui commence à souffler au mois d’août, qui rafraîchit l’air lourd de la Méditerranée. Mais depuis que je vends de l’huile d’olive, je le découvre menaçant.
Cette année, notre ennemi fut le vent chaud du Sud. Après un hiver pluvieux, promesse d’une grande récolte, il s’est mis à souffler au début du printemps, semblant appelé par la floraison des oliviers et a mis par terre une bonne partie de nos jolies petites fleurs blanches. Pas de fleur, pas de fruit, c’est la dure loi des arbres fruitiers. Mais rassurez-vous, il en reste juste assez pour régalez toutes nos marraines et tous nos parrains d’oliviers l’année prochaine !

Un vent nommé Zéphir



Zéphir est la personnification du vent d’Ouest dans la Mythologie. Si son souffle est redouté, c’est surtout pour ses amours déçues qu’il a inspiré Ovide et Euripide.
Comme vous le savez, les mythes que je préfère sont les mythes étiologiques, ceux qui cherchent à expliquer l’origine d’un phénomène naturel. Et vous l’avez deviné, ce cher Zéphir nous en fourni un très joli.
Un jour d’été, il tombe fou amoureux de Hyacinthe, jeune Sparte à la beauté captivante. Il tente de le séduire mais Apollon s’est lui aussi épris du jeune homme et obtient rapidement ses faveurs aux dépens de notre Dieu colérique. Rongé par la jalousie, Zéphir observe les deux amoureux s’entrainer au stade. Alors qu’Apollon s’élance un disque à la main, Zéphir détourne le vent afin de frapper le Dieu lumineux avec son propre disque. Mais c’est Hyacinthe qui s’effondre à terre, frappé accidentellement à la tempe. Terrassé de chagrin, alors que des gouttes de sang viennent tacher l’herbe du stade, Apollon les fait fleurir. En son honneur, les fleurs nées de ce jour tragique portent le nom de jacinthes.
*Année érotique, peu importe le siècle