Confiné.e.s dans l’huile – Épisode 2

Au sommaire en ce dimanche qui n’a pas du tout l’air d’un dimanche : 

  • Je vous dis tout sur les tamatas, ces jolis ex-voto grecs
  • Une suggestion pour une activité créative en famille : et si vous faisiez vos propres tamatas chez vous ?
  • Sainte Paraskeve ça ne vous dit rien ? C’est le moment pour en savoir plus sur la moins racunière des Saintes

Hakuna Tamata

Depuis l’Antiquité, en Grèce peut être plus qu’ailleurs, les hommes et les femmes n’ont jamais cessé de faire des offrandes à(aux) Dieu(x) pour s’assurer ses(leurs) bonnes faveurs.

Dans les chapelles orthodoxes, vous trouverez des murs entiers recouverts de petits rectangles en métal découpé représentant une personne aimée, des yeux, un bateau ou encore un militaire en uniforme. Ils implorent la renaissance d’un amour perdu, la guérison miraculeuse d’un organe ou le bon retour d’un marin.

Alors que dans la tradition catholique, les demandes intéressées sont symbolisées par un cierge allumé ou une pièce déposée, cette tradition prend en Grèce une forme beaucoup plus visuelle :

Le τάμα (de τάζω, promettre) est ce morceau de métal adressé à Dieu, à un Saint ou une Sainte. Ces petits contrats avec une divinité qui décorent les chapelles cachent mille et une histoires singulières.  Simple précaution, une façon de dire « on ne sait jamais » ou dernier espoir, comme pour se résoudre « si dieu ne peut rien y faire, c’est que c’est bien foutu ». 

J’aime beaucoup m’arrêter sur ces ex-voto naïfs dans les chapelles crétoises et en ces temps troublés, il me reviennent en tête.

Alors on s’y met nous aussi ! En plus, ça nous donne l’occasion d’en faire une super activité créative en famille. 

Tamata de la minuscule chapelle de Xerocampos en Crète, 2016

À vos voeux, prêts, partez

Pas besoin de métal : On prend une feuille de papier, des feutres et du ruban si on en a sous la main et c’est parti !

Proposez à vos enfants de dessiner ceux ou celles qu’ils ou elles veulent protéger, les personnes qui leur manquent ou toutes ces jolies choses que l’on rêve de refaire. En ces temps de confinement, on peut imaginer des tamatas évoquants la mer, des paysages sauvages, le parc d’en bas, un anniversaire plein d’enfants ou un ballon de foot. 

Voici ce que ça donne chez nous. Réalisation d’Achille, 4 ans, très porté sur le football !

Elle vous a à l’oeil

À l’instar de Saint Antoine de Padoue chez les catholiques, Sainte Parascève (en grec Αγία Παρασκευή, littéralement Sainte Vendredi) est certainement la plus sollicitée des Saints et Saintes ! Guérisseuse des aveugles, c’est peu de dire qu’elle doit posséder une une bonne collection de tamata chez elle*.

Parascève naît dans la région de Rome au IIe siècle après JC. Belle et bien éduquée, les prétendants ne manquent pas ! Mais faire un beau mariage est la dernière de ses préoccupations. Elle veut consacrer sa vie au Christ et le dit au et fort… Ce qui n’est pas au goût de l’empereur romain Antonin le Pieux qui la convoque pour lui ordonner de mettre un terme à sa campagne d’évangélisation. On a beau être empereur, tout ne va pas toujours comme on veut : une fois face à elle, il tombe sous son charme et la demande en mariage. Le refus de Parascève signe le début de ses ennuis. Elle est enfermée et torturée mais semble protégée par sa foi. La curiosité autour de cette jeune martyre grandit alors. Pour se débarrasser d’elle une bonne fois pour toutes, elle est jetée dans une marmite d’huile bouillante. Le miracle arrive au bon moment ! Au lieu d’être ébouillantée, elle semble au contraire rafraîchie par le liquide en ébullition. Antonin s’approche pour constater de lui-même cette sorcellerie et c’est là qu’elle en profite pour lui asperger le visage d’huile chaude. Aveuglé, il la supplie de lui venir en aide. Pas rancunière pour un sou, elle accepte et lui rend immédiatement la vue. Antonin la libère mais elle sera de nouveau emprisonnée puis décapitée sous le règne de Marc Aurèle. 

En souvenir de la guérison miraculeuse de l’empereur Antonin, elle est depuis la Sainte protectrice des yeux. 

La Sainte Parascève est célébrée le 26 juillet dans les nombreux villages Grecs qui portent son nom, notamment celui qui se trouve dans la banlieue nord d’Athènes ou sur l’île d’Amorgos dans les Cyclades. Grandes tablées, processions et danses traditionnelles sont au programme !

* on me glisse à l’oreille que, comme beaucoup d’entre vous, elle profite du confinement pour faire le tri dans 19 siècles de tamatas reçus. 

Je vous souhaite à tous d’être protégé.e.s par
tous les Saints et les Saintes du monde !

Un tama maison pour finir me semble approprié 
😉

Confiné.e.s dans l’huile – Épisode 1

Nous y voilà ! À l’image du Minotaure dans son labyrinthe, nous sommes toutes et tous enfermé.e.s chez nous, avec notre attestation sur l’honneur comme fil d’Ariane.

Pour commencer, retournons au commencement, au temps que les moins de 5 siècles avant JC ne peuvent pas connaître : l’antiquité grecque avec l’histoire (huilée forcément) de la fondation d’Athènes ainsi qu’un petit jeu. 

Mythologies de l’olivier

La fondation d’Athènes 

Athéna contre Poséidon
Noël Hallé, 1748
Musée du Louvre

Sous le règne de Cécrops le terrible roi-serpent, premier souverain légendaire d’Attique et fondateur d’Athènes, deux divinités de l’Olympe se disputent pour devenir la marraine ou le parrain de cette nouvelle cité promise à devenir la plus prospère et la plus puissante de toutes : Athena, déesse de la sagesse, de la raison et de la stratégie guerrière, affronte Poséïdon, dieu des mers.

Poséïdon se présente en premier et frappant le rocher de son trident fit apparaitre un magnifique cheval*. Athena, quant à elle, fit naître de la terre un bel olivier. 

Plus plusieurs versions du mythes co-existent :

  • La version « c’est ma ville, c’est moi qui choisit » 

Cécrops choisit Athena, dont le présent est le plus utile. Simple, basique.

  • La version « et à  la fin, c’est les hommes qui gagnent »

Selon la variante de Varron, Cécrops soumet le choix à une assemblée mixte. Les femmes votent en faveur d’Athena et les hommes de Poséïdon. Les femmes, plus nombreuses d’une voix, font pencher la balance en faveur d’Athena. Furieux, Poséïdon submerge l’Attique sous les flots. Pour apaiser sa colère, les Athéniens doivent imposer aux femmes trois punitions : les femmes n’auront plus le droit de vote, aucun enfant ne portera le nom de sa mère et les femmes ne seront plus appelées Athéniennes**.

  • La version « c’est pas pour rien que l’expression jeune et con existe »

La foule pousse en avant un aîné pour affirmer que les deux cadeaux étaient dignes d’être choisis, et précisant : le cheval représente la force, le courage, la guerre, alors que l’olivier symbolise la prudence, la sérénité et la paix. Le vieillard en question avança que la guerre pouvait apporter richesses et pouvoir, mais qu’il était incertain. Par contre, la paix apportait des biens moins beaux et originaux, mais ils étaient plus sûrs et plus durables. Tous approuvèrent et choisirent le don d’Athena, qui donna finalement son nom à la ville. 

Mais comme on est jamais trop prudents, les citoyens promirent à Poséïdon de lui élever un temple malgré tout et s’engagèrent à lui apporter des offrandes dans l’espoir de garder sa faveur.

*Une version alternative veut qu’une source d’eau salée en jaillit (“l’eau est là” dirait Kirikou qui a fait aussi bien même si, lui, il était tout petit)
** Une version votée par un membre de l’académie des Césars, probablement.

Objets mythologiques en bois d’olivier 

Un jeu à faire en famille ! 

 Devinez ce que sont ces objets aux propriétés aussi magiques qu’un filet d’huile sur un fromage de chèvre et associez les avec les définitions ci-dessous :

A. Heracles, demi-dieu fils de Zeus et d’Alcmène, est presque toujours représenté avec sa mythique massue taillée dans une grosse branche d’olivier sauvage, dont le bois est lourd et serré. 


B. Dans l’Odyssée d’Homère, le pieu avec lequel Ulysse crève l’œil du cyclope Polyphème est taillé dans un olivier, symbole de sagesse et de force.


C. Couple mythique s’il en est, Pénélope et Ulysse fondent leur amour sur la mémoire et la volonté. La reconnaissance des deux époux a lieu grâce à un acte de mémoire, un signe secret : le lit conjugal que seuls eux deux savent construit sur un tronc d’olivier. 


D. Les Grecs récompensaient les héros des Jeux olympiques antiques par des branches d’olivier et des jarres d’huile d’olive. Mieux qu’une médaille non ?


RÉPONSES : 

1-D, 2-A, 3-B, 4-C

Je vous souhaite à tous d’être protégé.es par Hygie, déesse de la santé, de profiter de ce confinement pour passer de doux moments avec Morphée, dieu des rêves et de laisser à votre porte Éris, déesse de la discorde

Manon

L’huile de la paix

Divisée par un conflit qui dure depuis plus de 45 ans, l’île de Chypre à l’extrême Est de la Méditerranée est coupée en deux.

Petit rappel des épisodes précédents :

1974 : Des nationalistes chypriotes grecs, soutenus par les colonels Grecs, tente un coup d’État pour rattacher l’île à la Grèce. La Turquie réplique militairement et occupe militairement le Nord de l’île sous prétexte de protéger la minorité chypriote turque. Ce conflit fait 3 000 morts et laisse Chypre divisée en deux État indépendants.

1983 : La Turquie est le seul pays à reconnaître la “République turque de Chypre du Nord” qui entérine la partition de l’île.

2003 : Les échanges de marchandises entre le Nord et le Sud sont rétablis.

2004 : L’ONU organise un référendum pour la réunification de l’île. Il est largement approuvé par les Chypriotes turcs (près de 65 %) mais rejeté par les Chypriotes grecs (à plus de 75 %).

2004 : La partie Sud de l’île rentre seule dans l’Union Européenne.

Hasan et Alexandros dans leurs oliviers

Si la situation semble  bloquée diplomatiquement, tout espoir de réconciliation n’est pas perdu. La preuve, deux jeunes producteurs, Hasan Siber, Chypriote-turc, et Alexandros Philippides, Chypriote-grec, ont décidé de lancer ensemble Coliveoil, l’une des rares start-up bicommunautaires de l’île. Ils vendent une huile dont les olives ont été récoltées dans l’ensemble de l’île.

Pour en apprendre plus sur cette “huile de la paix”, je vous recommande de lire l’article qui lui est consacré dans le magazine Good Planet.

Schoïnopentaxophile et autres curiosités étymologiques

Le 9 février nous fêtons la langue grecque et pour rendre hommage à cette langue magnifique voici l’étymologie de mon top 5 des mots français dérivés du grec :


5 . Bostrychomancie
Définition : Divination par l’observation des boucles de cheveux d’un jeune enfant, de leur mouvement au vent et de leur disposition
Composé de βόστρυχος / bóstrukhos « boucle de cheveux » et  μαντεία / manteía « divination »

4. Schoïnopentaxophile
Définition : Collectionneur de cordes destinées à la pendaison 
Composé de σχοῖνος / skhoinos  « corde », πενταξός / pentaxos « quintuple » et φίλος / philos « amateur »

3. Paraskevidékatriaphobie 
Vous avez deviné sa signification ?… Toujours pas ? Alors un petit rébus pour vous aider :

Définition : Phobie du Vendredi treize
Composé de Παρασκευή / paraskevi « vendredi », δεκατρείς / decatreis « treize » et φόϐος / phóbos « peur »

2. Abutyrotomofilogène
Définition : Qui n’a pas inventé le fil à couper le beurre
Composé de a- (privatif) βούτυρο / boútyron « beurre », τέμνειν / tomo « couper », fil, -o et  γένος / génos « race » de γίγνομαι / gígnomai « engendrer »

1. Tétratrichotomie
Définition : En langage xyloglotte (définition :  langue de bois composé de ξύλον / xúloν « bois » et γλῶττα / glôtta « langue »), c’est l’art qui consiste à couper les cheveux en quatre, néologisme inventé par Umberto Eco !
Composé du grec ancien τετρα- / tetra- « quatre », du latin capillus « cheveux », et du grec ancien ἐκτομή / ektomê « coupure »

Et vous, quels sont vos mots français à étymologie grecque préférés ?


Sa Saleté des mouches

Un hiver pluvieux, un printemps fleuri, un été sec : tout était réuni pour une récolte 2019/2020 optimale à la fin de l’automne. Malheureusement, un petit insecte aux ailes transparentes est venu, une fois de plus, gâcher la fête ! 

La mouche de l’olivier est devenue en une dizaine d’années l’ennemi public numéro un des oléiculteurs tout autour de la Méditerranée. Elle pond dans les olives pas encore mûres et peut, en quelques jours seulement, détruire une récolte entière. Une fois que l’olive a été touchée, elle tombe ou est abimée, ce qui nuit considérablement à la qualité de l’huile. 

Cette année, les attaques de mouches sont arrivées relativement tard, au cours du mois d’octobre et ce n’est qu’en récoltant très tôt que certains producteurs – dont le nôtre ! – ont pu sauver une grande partie de leur production. 

Si les dégâts liés au δάκος (nom grec de cette fameuse mouche) sont de plus en plus importants et réguliers, c’est – vous l’avez deviné – la faute au réchauffement climatique. Les étés secs suivis d’un automne relativement froid convenaient beaucoup mieux à la culture de l’olivier. Tandis que ces dernières années, les mois de septembre et octobre se suivent et se ressemblent : un temps estival et de légères précipitations. La combinaison chaleur et humidité, celle que préfère notre ennemi volant, perdure bien trop tard dans la saison, une fois que les olives sont déjà sur les arbres. 

La solution : récolter de plus en plus tôt. Mais c’est tout une économie locale qui doit se réinventer : ses deux piliers, l’olive et le tourisme, tendent à se superposer. D’autant plus que le tourisme vert, celui composé de randonneurs, arrive de plus en plus tard, les saisons touristiques terminant désormais au mois de novembre. Il faut aussi, est ce n’est pas une mince affaire, convaincre les moulins – ou plutôt les présidents de moulins, souvent âgés et très rétifs au changement – d’ouvrir plus tôt. Sans compter que les arômes de l’huile s’en trouvent modifiés. Cela donne une huile avec des notes un peu plus herbacées avec plus d’amertume. Un vrai choix de Sophie, je vous dis ! 

La Vasilopita / Η Βασιλόπιτα

Texte de l’association Phonie-Graphie que l’on remercie !

Les fêtes traditionnelles ont pour la plupart une origine paysanne, surtout dans une époque d’exode rural. Dans les campagnes, la « Vassilopita » se préparait à l’aube de la fête de Saint Basile c’est-à-dire le 1er janvier, le jour de l’An. En Grèce en effet c’est la Saint Basile (΄Αγιος Βασίλειος, Αï-Βασίλης) et non le Père-Noël qui apporte les étrennes aux enfants et qui donne son nom à la galette, la Vassilopita (Βασιλόπιτα). La tradition du pain festif se trouve déjà dans l’antiquité, culte de Déméter ou dédicace à d’autres dieux ou démons auxquels on l’offrait pour obtenir santé et puissance. De même, lors des Saturnales grecques ou romaines, une monnaie cachée dans un gâteau était signe de chance pour celui qui la trouvait et devenait le « roi de la fête » (Cf. Βασίλης-Βασιλιάς).

Les dates de fête de célébration des douze jours, de Noël à l’Epiphanie, sont très proches de celles de la période pré-chrétienne où les cieux de la chance s’ouvraient et où l’année changeait. Certes, les brioches paysannes consacrées au Christ et les petits pains en forme de couronnes que les bergers préparaient pour la Saint-Basile étaient déjà des porte-bonheur augurant santé et puissance pour la nouvelle année. Ils contenaient aussi une pièce de monnaie, signe de richesse pour celui qui la découvrait. La cérémonie elle-même avec son partage hiérarchique est peut-être venue avec les Croisés. On retrouve en effet des coutumes semblables chez les Français et les Belges dès le XIIIème siècle.

Outre son caractère de bon augure, la pièce de monnaie a également un sens magique et religieux comme l’or, l’argent et en général les couleurs brillantes qui conjurent de surcroît le mauvais sort. Dans la maison on la garde près des icônes.

Elle transmet sa qualité magique de fertilité et de bien-être au gâteau tout entier dont on lance des morceaux dans les champs et les vergers, tandis que les jeunes filles en placent sous leur oreiller pour voir en rêve leur futur fiancé.

Des récits concernant différentes provinces attestent d’une grande richesse cérémonielle. En Thrace orientale par exemple, où en plus de la pièce on joignait dans la pâte un grain de raisin, un grain de blé, un brin de paille pour les vaches, etc. Une autre explication issue des synaxaires, récits de la vie des saints, nous vient d’Asie Mineure. Alors que Saint Basile était évêque de la Césarée, le préfet de Cappadoce prit des mesures draconiennes pour percevoir les impôts. Epouvantés, les habitants rassemblèrent ce qu’ils avaient de plus précieux pour l’offrir au préfet. Radouci par ce geste, ce dernier refusa les présents et les invités s’en retournèrent tout joyeux. Mais comme il était difficile de restituer à chacun ses cadeaux dont beaucoup se ressemblaient, Saint Basile eut recours à une solution magique : il plaça les objets à l’intérieur de petits gâteaux qu’il distribua. Et – ô miracle – chacun retrouva ce qu’il avait offert.

Cette coutume de tirer les rois s’est répandue dans nombre de pays. Mais sans prendre l’ampleur qu’elle a en Grèce où, sortant du cadre familial, elle s’est étendue aux cercles socioprofessionnels.

Souhaitons qu’elle se maintienne et conserve son caractère populaire et traditionnel.

Du sucre plein les doigts

Les kourabiedes sont des biscuits préparés pour Noël à base de beurre, de farine, d’amandes et… beaucoup de sucre glace. 

Ils sont inspirés d’un gâteau truc, le kurabiye à base d’amande. Une preuve de plus que la culture du sucrée en Grèce doit beaucoup à leurs voisins-ennemis ottomans (comment vivrait-on sans baklava ?!). Devenus les biscuits traditionnels de Noël, ils sont souvent en forme de croissant et un clou de girofle peut être ajouté sur le dessus. Il représente le don des épices fait par les Rois Mages à Bethléem. 

En voici la recette :

INGREDIENTS

  • 500 g de beurre de brebis (à température ambiante) – ou de beurre de vache si vous n’en trouvez pas
  • 200 g d’amandes, émondées et grillées
  • 300 g de sucre glace
  • 650 g de farine
  • 30 ml de brandy (que l’on peut remplacer par du rhum ou de l’ouzo)
  • ½ cuillère à café d’essence de vanille

Pour le glaçage

  • 2 cuillères à soupe d’eau de fleur d’oranger (ou d’eau de rose)
  • 300 g de sucre glace

INSTRUCTIONS

  1. Blanchir, puis griller les amandes dans un four préchauffé à 180 degrés, pendant environ 20 minutes. Laisser refroidir, puis couper grossièrement en petits morceaux.
  2. Tamiser le sucre. Puis tamiser la farine séparément.
  3. Battre le beurre avec le sucre glace à vitesse lente jusqu’à incorporation, puis battre à vitesse rapide pendant dix minutes jusqu’à ce que le mélange devienne blanc et mousseux. Ajouter le brandy et la vanille et mélanger.
  4. Arrêter le mélangeur. Changer le crochet et attacher le crochet à pâte. Ajouter les amandes et continuer de mélanger. Ajouter la farine progressivement jusqu’à ce que la pâte soit molle mais non collante aux mains.
  5. Vous pouvez utiliser un emporte-pièce ou façonner les biscuits à la main en boules rondes ou croissants et les placer espacées, sur une plaque de cuisson recouverte de papier sulfurisé.
  6. Cuire au four pendant environ 12 minutes, selon votre four. Ils seront un peu mous, mais se raffermiront une fois refroidis.
  7. Retirer du four et laisser refroidir.
  8. A l’aide d’un pulvérisateur, vaporiser avec de l’eau de rose ou de fleur d’oranger sur les deux côtés des biscuits.
  9. Retourner les biscuits sur une surface sèche et en utilisant un tamis, saupoudrer de sucre glace. Retourner les biscuits à nouveau et continuer à saupoudrer jusqu’à ce qu’ils soient entièrement recouverts.

L’huile d’olive, le nouveau quinoa ?

Quand la loi du marché prive les consommateurs et appauvrit les producteurs.

Il y a quelques années, on apprenait que la mode du quinoa chez les consommateurs bobos avait créé une hausse des prix insoutenable pour les consommateurs péruviens pour qui cette céréale était l’aliment de base depuis des siècles. Cette situation ubuesque où les habitants ne peuvent plus se permettre de consommer leur propre production est malheureusement loin d’être unique. Le Mexique en a aussi fait l’expérience avec ses avocats et nous découvrons désormais que c’est le tour des pays du sud de la Méditerranée avec… l’huile d’olive !

Quelques indices :

  • Le 4 novembre, le ministre du commerce tunisien a fixé la marge bénéficiaire pour la revente d’huile d’olive à 15% pour tenter de lutter contre l’inflation des prix. 
  • Le 14 novembre, la consommation d’huile d’olive en Algérie est tombée de 7 litres en 2010 à 1,5 litre par an par habitant cette année. La raison ? Des prix de vente trop élevés.

Acclamée en raison de ses vertus pour la santé, la consommation d’huile d’olive dans le monde (riche) a été multipliée par deux en 25 ans. Une croissance de la demande qui s’accompagne d’une montée des prix : la célèbre loi de l’offre et de la demande en somme.

Récolte au Maroc, 2016

Les producteurs sont-ils devenus riches au moins ? Hélas non !

Malheureusement, ce n’est pas si simple. Si le prix de vente aux consommateurs, en Tunisie comme en France, augmente, cela ne veut pas dire que les producteurs ont été mieux rémunérés.

Ce sont les quantités produites à l’échelle mondiale bien plus que la demande finale des consommateurs qui dictent les fluctuations du prix du kilo d’huile à la coopérative. Par conséquent, au lieu d’augmenter, les prix sont très volatiles et rémunèrent toujours moins bien les producteurs.

En Tunisie par exemple, l’huile vierge extra s’échangeait moins de 3,50€ le kilo ces dernières semaines, soit près de 20% de moins que l’année dernière.

Les producteurs doivent aussi faire face à de nouveaux défis. Avec le réchauffement climatique, les fluctuations du climat sont plus fortes que jamais.

Plus anecdotique mais pas moins inquiétant, dans certaines régions de Tunisie, les producteurs font appel aux services d’agents de sécurité armés pour garder les oliveraies et ne pas risquer d’avoir leurs olives volées pendant la nuit ! Une charge financière de plus à ajouter à la main d’oeuvre pour la récolte, au matériel, à l’eau…

Récolte en Tunisie, 2018

En Grèce, la situation financière est encore plus dramatique. L’année dernière, en raison de l’absence de pluie, la production a baissé de 30% et pour couronner le malheur des producteurs, les prix à la coopérative ont été particulièrement bas, descendant jusqu’à 2,50€ le litre.

Mais dans ce cas, pourquoi le prix de vente, lui, augmente-t-il même dans les pays producteurs ?

Dans les pays du Maghreb comme partout en Méditerranée, les producteurs ne sont pas maîtres de leur destin car ils vendent leur huile aux coopératives locales qui, à leur tour, se tournent vers des négociants qui revendent aux géants de l’agro-alimentaire. La Tunisie exporte plus de 80% de son huile, le marché extérieur étant considéré comme bien plus juteux que son marché intérieur. Logiquement les prix pour le peu d’huile qui reste en Tunisie montent en flèche.

Ajoutez à cela l’effet de change entre le dinar et l’euro et on ne sera pas étonné de constater que le prix de l’huile d’olive a plus que doublé en cinq ans en Tunisie.

Récolte en Grèce, octobre 2019

Les Grecs semblent eux encore épargnée par cette cruelle loi de l’offre et de la demande et la Grèce reste le premier consommateur mondial d’huile d’olive. La raison principale étant l’attachement des Grecs à leurs oliviers. La production grecque demeure morcelée, chaque famille produisant son huile : une partie se retrouve sous l’évier de la cuisine, dans des gros bidons de cinq litres, et le surplus est vendu à la coopérative locale.

On m’a souvent dit qu’un Grec préfère vendre sa maison que ses oliviers.

Même s’ils ne rapportent rien, les oliviers restent dans la famille. L’avantage, c’est que personne ou presque n’achète son huile ! Le terrible désavantage c’est que le rapport de force entre des micro-producteurs et des géants de l’agro-alimentaire est trop inégal.

Alors que faire ?

Si Cuba a trouvé une solution radicale avec son système à deux monnaies, celle des touristes et celle des locaux, il semble peu probable qu’un pays méditerranéen s’y convertisse de si tôt.

En tant de consommateur, on peut s’attacher à privilégier les filières courtes, celles qui rémunèrent les producteurs au juste prix. Le développement de ces filières alternatives permet de faire retomber la pression financière de cette économie globalisée où une grosse tempête en Andalousie a un impact sur les prix à l’Est de la Crète. Car les filières courtes sont aussi celles qui n’imposent pas leurs prix aux producteurs et qui ne renégocient pas chaque année.

Le fait que vous soyez en train de lire cet article me laisse penser que vous êtes en très bon chemin ! Car ces réflexions sont justement à l’origine du projet Adravasti. Depuis le début, la politique d’achat est transparente : 5,50€ pour l’huile et sa mise en bidon vont dans la poche du producteur. Ce prix est le même les bonnes et les mauvaises années. Il permet par exemple à Manolis de continuer à embaucher des travailleurs, même après une récolte modeste.

Si vous voulez continuer la discussion, partager votre expérience, n’hésitez pas à m’écrire à manon@adravasti.fr, je publierai vos témoignages à la suite de cet article !

La récolte (à la main)

Il y a quelques jours, accompagnés d’amis, j’ai récolté à la main un champ de 35 oliviers dans le village de Chochlakies (Χοχλακιες) pour en faire des olives de tables.

Pour bien faire, il ne faut prendre que les olives bien mûres et non piquées par la terrible mouche de l’olivier, la tristement célèbre δάκος

Un champ familial, dont les arbres qui avaient été taillés en février dernier étaient prêts à être récoltés dès le début du mois d’octobre. Tout juste taillés, les arbres avaient peu de branches secondaires donc peu d’olives. Et comme chacune d’entre elles avait reçu beaucoup d’eau, elles sont arrivés à maturité de façon précoce.

Pourtant, impossible de les récolter pour en faire de l’huile : toutes les coopératives des alentours étaient fermées.

Le timing de la récolte est une décision cruciale qui peut parfois échapper aux producteurs quand les coopératives locales prennent la décision de n’ouvrir leurs moulins que fin octobre. C’est ce qui m’est arrivé la semaine dernière.

Pour ne pas les gâcher, nous avons décidé, une fois n’est pas coutume, de faire une petite récolte à la main. L’intérêt ? Ne pas avoir à installer les filets ! Travail bien plus physique et contraignant qu’il n’y parait. Idéal quand les oliviers ne sont pas très chargés mais dont on ne veut pas laisser la production aux oiseaux.

Et comme les moulins étaient fermés, nous avons décidé d’en faire des olives de tables.

À l’Est de la Crète, les olives sont habituellement réservées à la production d’huile d’olive. La variété koroneiki produit de toutes petites olives avec un gros noyaux et peu de chair, pas terrible pour les olives de table mais parfait pour l’huile. Ceci étant dit, on les apprécie beaucoup à l’heure du mezze, d’autant plus quand elles sont préparées dans des saumures aromatisées au romarin, au thym ou à l’ail.

En une journée, nous avons récolté environ 4 grosses caisses d’olives.

Conservées dans des caisses en plastiques plutôt que dans les traditionnels sacs en toile de jute, les olives sont moins compressées et se conservent mieux en attendant d’être préparées ou d’aller au moulin.

Bilan de la journée : 35 oliviers passés au peigne fin, 4 pauses à l’ombre des oliviers à déguster les merveilleux spanakopitas de la boulangère de Pale Kastro et 4 caisses pleines d’olives.

Place à l’étape suivante : la préparation des olives (mais pour cela, il faudra attendre encore un peu !)

Après l’effort, le hamac

Sainte Paraskevi / Αγία Παρασκευή

Ce 26 juillet, les grecs fêtent la Saint Parascève, en grec Αγία Παρασκευή, littéralement Sainte Vendredi. 

Parascève naît dans la région de Rome au IIe siècle après JC. Belle et bien éduquée, Parascève a tout pour plaire mais faire un beau mariage est la dernière de ses préoccupations. Elle décide de consacrer sa vie au Christ, ce qui n’est pas au goût de l’empereur romain Antonin le Pieux qui la convoque pour lui ordonner de mettre un terme à sa campagne d’évangélisation. Mais rien ne se passe comme prévu : une fois face à elle, il tombe sous son charme et la demande en mariage. Le refus de Parascève signe le début de ses ennuis. Elle est enfermée et torturée mais semble protégée par sa foi et la curiosité autour de cette jeune martyre grandit. Pour se débarrasser d’elle une bonne fois pour toutes, elle est jetée dans une marmite d’huile bouillante. Le miracle arrive au bon moment ! Au lieu d’être ébouillantée, elle semble au contraire rafraîchie par le liquide en ébullition. Antonin s’approche pour constater de lui-même cette sorcellerie et c’est là qu’elle en profite pour lui asperger le visage d’huile chaude. Aveuglé, il la supplie de lui venir en aide. Pas rancunière pour un sou, elle accepte et lui rend immédiatement la vue. Antonin la libère mais elle sera de nouveau emprisonnée puis décapitée sous le règne de Marc Aurèle. 

En souvenir de la guérison miraculeuse de l’empereur Antonin, elle est depuis la Sainte protectrice des yeux. 

La Sainte Parascève est célébrée dans les nombreux villages grecs qui portent son nom, notamment celui qui se trouve dans la banlieue nord d’Athènes ou sur l’île d’Amorgos dans les Cyclades. Grandes tablées, processions et danses traditionnelles sont au programme. 

Paximadi (παξιμάδι), beaucoup plus que du pain dur

Le village d’Adravasti n’a beau compter qu’une grosse dizaine d’habitants, ses survivants n’ont pas renoncé à la magnifique tradition du paximadi (παξιμάδι). Une à deux fois par an, ils se réunissent et, sous la direction de Ririka, réalisent en grande quantité ce pain à base d’huile d’olive, de farine d’orge et de blé. 

Toute l’année, le paximadi se consomme dur et pour s’assurer de sa conservation, il est cuit deux fois dans l’imposant four à bois du village.

Les pains sont façonnés sous l’oeil vigilant de Ririka
Le four du village, Nikos à la manoeuvre
Après la première cuisson (à droite)
L’occasion de se retrouver toutes et tous
Toutes ces photos ont étés prises dans le mois dernier à Adravasti.
Merci Jean-Pierre et Pierre pour ce super reportage !

Ce pain doit son nom au crétois Pàxamos auteur de nombreux livres de recettes de cuisine au 1er siècle après JC !

Sous l’ère byzantine (IVème au XIIIème siècle), le nom de Pàxamos est synonyme de nourriture de qualité. Puis, au fil du temps, ce pain facile à réaliser devient l’ingrédient de base des populations des campagnes. Le paximadi est alors associé à la ruralité et même à la pauvreté. 

Sous l’occupation des vénitiens (1204-1669), on impose aux crétois de produire de très grandes quantités de paximadi pour nourrir la flotte de l’armée vénitienne. Il a même au sein de l’armée, une troupe dont la mission exclusive est d’acheminer le paximadi !

Dans les monastères, tandis que les moines ont droit au pain frais, les plus jeunes recrues doivent se contenter de paximadi. C’est aussi, avec les fruits, la seule nourriture tolérée pour les ermites. Pour ces raisons, les monastères crétois ont une grande tradition de fabrication du paximadi. Le monastère de Toplou, à quelques kilomètres de notre village, est encore aujourd’hui réputé pour la qualité de son pain dur. 

C’est ce pain que l’on utilise pour la recette du Dakos (ντακος) – le mezze typiquement crétois que ma soeur Léa voulait toujours commander au restaurant.

Et comme je suis là pour vous faire plaisir, en voici la recette (ULTRA simple ET délicieuse) 

  • Du paximadi (que vous pouvez remplacer par des biscottes suédoises ou du pain de campagne grillé)
  • Une grosse tomate bien mûre (dans quelques mois !) ou une boite de tomates concassées de bonne qualité
  • Un oignon nouveau émincé ou une petite moitié d’un oignon rouge émincé très finement (selon vos préférences)
  • Feta émiétée (au moins 3 cuillère à soupe – il n’y en a jamais trop !)
  • 1 cuillère à soupe de vinaigre (de cidre ou de vin)
  • 1 cuillère à soupe de miel 
  • Origan
  • Basilic frais
  • Quelques grosses olives noires 
  • et de l’huile d’olive !

Recette :

Couper la moitié de la tomate en cube et râper l’autre moitié. Dans un bol, mélanger : la tomate rapée, le vinaigre, le miel, le sel, le poivre, le basilic finement haché et l’origan. Corriger l’acidité ou le sucre à votre goût. Verser le mélange sur les pains et ajouter un bon filet d’huile d’olive. Ajouter la tomate hachée et l’oignon émincé puis la feta émiétée et enfin les olives dénoyautées. On peut aussi ajouter quelques câpres. Juste avant de servir, on rajoute un filet d’huile d’olive et un tour de moulin à poivre. 

Χρόνια πολλά μαμά!

La fête des mères est très fêtée en Grèce. D’abord liée au culte de Rhéa, elle est célébrée pendant les Ides de mars. Puis, sous influence orthodoxe, les grecs se mettent à la célébrer à travers la figure de Marie. La fête a alors lieu le 2 février, 40 jours après la naissance de Jésus. Ce n’est que dans les années 1960,  qu’elle est décalée au mois de mai, pour s’aligner aux pratiques occidentales. 

Terre cuite trouvée à Myrina, sur l’île de Limnos, représentant Déméter et sa fille Perséphone, -330 avant JC. 

Maternité et mythologie grecque

La figure de la mère est un thème développé dans sa complexité dans la mythologie grecque. Mais si presque toutes les divinités ont une progéniture, très peu d’entre elles leur accordent de l’attention…

L’instinct maternel d’Aphrodite, déesse de l’amour, n’est guère développé. Elle aura néanmoins une relation très complémentaire avec son fil Eros, dieu du désir, et c’est vis-à-vis d’Enée, Prince de Troie, son fils mortel, qu’elle se montre la plus protectrice : elle intervient dans la bataille, elle qui n’est pas guerrière, au risque de se blesser. 

Demeter, elle, porte sa maternité jusque quand son nom (Δη-μήτηρ). Mère célibataire, elle conçoit ses enfants hors mariage. Après le rapt de sa fille Perséphone par Hadès, le dieu des Enfers, elle part à sa recherche et délaisse les cultures. Pour mettre fin à la sécheresse et à la famine qui règnent soudainement sur Terre, Zeus trouve un compromis : Perséphone passera un tiers de l’année avec son mari aux Enfers, l’hiver, et le reste de l’année aux côtés de sa mère sur Terre. Ce que la mythologie nous apprend, c’est que la douleur d’une mère blessée peut la rendre terriblement puissante. 

Son opposé est probablement Héra, l’épouse de Zeus. Celle-ci représente bien plus l’union conjugale que la maternité. D’ailleurs, elle n’est guère féconde : ses enfants sont des divinités mineures (Hébé) ou ayant pas mal de problèmes avec elle (Héphaïstos). C’est avec d’autres épouses (Létô, Maïa, Dioné, Sémélé…) ou seul (pour Athéna) que Zeus engendre les grandes divinités. 
Héra tente, souvent en vain, de défendre les intérêts des enfants légitimes. Mais ce souci s’exprime bien plus dans son acharnement pour les enfants illégitimes que par sa sollicitude pour ses propres enfants. D’ailleurs, quand elle met au monde Héphaistos, fâchée d’avoir enfanté un être boiteux, elle le lance du haut du ciel ! Dans la mythologie, l’épouse et la mère ne se trouvent jamais dans la même personne… 

Plus tard, la religion orthodoxe, ne parvenant pas à s’émanciper tout à fait de la mythologie antique, tenta de réhabiliter Héra comme mère, protectrice du foyer. 

La feta / Η φέτα

En avril commence la saison de… la feta ! Même si cela ne se retrouve pas toujours dans nos habitudes et qu’il m’arrive d’acheter de la feta au supermarché au mois d’octobre, elle est produite entre janvier et mai et affinée trois mois minimum ce qui nous amène à une saison de dégustation d’avril à décembre. Pourquoi ? Tout simplement car le goût du fromage est étroitement lié à l’alimentation de la brebis. 

Quand je pense à la feta, je pense à l’épicerie de Βιβι, sur la place de Zakros. Chez elle, j’achète du pain, des biscuits γεμιστα et de surtout de la feta. Βιβι s’équipe d’un gant et plonge sa main dans le gros bidon. À Zakros, la feta s’achète à la coupe et a un goût puissant et acidulé. 

Si fiers quand il s’agit de leur patrimoine, les grecs ont mené une bataille juridique épique pour obtenir l’AOP et interdire donc ces “fetas” produites au Danemark à base de lait de vache. 

Quelques liens pour aller plus loin :

Où acheter de la bonne feta ?

Deux adresses à Paris : 

  • Le top se trouve chez Profil grec justement, 7 rue de Savies dans le 20ème
  • Pour ceux à la recherche du meilleur rapport qualité prix, l’épicerie méditerranéenne Épices et saveurs, 2 Avenue Parmentier dans le 11ème, a une super gamme pas très chère

Les vrais secrets du régime crétois



  • L’huile d’olive de Manolis – Bidon de 500ml et son bec verseur anti-goutte

À Piskokefalo, petit village sur les hauteurs de l’AOP de Sitia, les hivers sont frais, bien plus que dans la plaine. Cette fraîcheur, on la retrouve dans l’huile de Manolis. Elle est caractéristique de la variété Koroneiki et pour accentuer son fruité vert, nous récoltons les olives dès le mois de novembre.



  • Le miel de thym de Kostas – Pot de 250ml

Dans la montagne crétoise parsemée de bosquets de thym, les petites ruches colorées indiquent la discrète présence humaine et égayent l’aridité du paysage. Le miel liquide à la couleur ambrée que l’on y récolte possède des notes rondes et puissantes. Grâce à son pouvoir cicatrisant, on peut aussi l’utiliser pour lutter contre les cicatrices d’acné, les plaies infectées ou les brûlures.



  • Le dictame de Serena – Sachet de 30g

Peu de plantes sont aussi symbolique d’une région. Longtemps utilisé en usage externe comme antiseptique, on l’utilise aujourd’hui en infusion pour lutter contre les rhumes, les infusions bucco-dentaires et les maux de ventre. 3-4 min dans de l’eau frémissante, il développe des notes fraiches rappelant la verveine.

« On prétend que les chèvres sauvages de Crète, quand elles sont percées d’une flèche, se mettent à chercher le dictame qui paraît avoir la propriété de faire sortir le fer de la plaie »

Aristote, Histoire des animaux, 343 av. JC.



  • Le sirop de caroube de Aristea – Bouteille de 330ml

Comme l’olivier, le caroubier est un arbre que l’on trouve tout autour de la Méditerranée. En voie d’oubli, il revient à la mode grâce à ses vertus innombrables. «Super-aliment », le sirop de caroube est un substitut idéal du cacao et se mélange à merveille au yaourt grec. On peut aussi le prendre avec du thé ou une infusion de cannelle. Composé à 40% de fibres, il améliore la digestion et le transit et avec plus de 350mg de calcium aux 100g, soit trois fois plus que le lait, il prévient l’ostéoporose.



  • L’huile essentielle de thym d’Andreas – Flacon avec codigoutte de 5ml

L’huile essentielle de thym est un tonique très puissant. Bactéricide et antivirale, elle débarrasse des herpès et de toutes les infections bactériennes et virales. Elle protège les appareils respiratoires, génito-urinaires (pour les personnes sensibles aux cystites) et digestifs.

Comment l’utiliser ? En massage, diluer une goutte dans 4 gouttes d’huile d’olive. En inhalation,
diluer quelques gouttes dans de l’eau chaude et inhaler les vapeurs.

Julie Caute, cheffe chez Dame Jane

 

Julie est la cheffe du restaurant Dame Jane, dans le quartier Belleville à Paris. On y trouve un menu unique le soir et double menu le midi, renouvelés tous les jours. Les produits sont de saisons, sourcés dès que possible en circuit court dans une “idéologie artisanale propre et bien faite”. Et pour l’huile d’olive ? Vous avez deviné : Adravasti !

Quels sont tes critères pour sélectionner une huile d’olive ?

Ça commence par la texture. Je vais aller vers des huiles soyeuses parce que j’ai un vrai problème avec l’astringence. Ensuite je vais chercher un équilibre entre l’amertume et l’acidité. Enfin sa façon de noter les aliments. Je vais adorer les huile d’olive puissantes mais je refuse que dans ma cuisine elles prennent le dessus sur le produit. C’est essentiellement pour ça que je ne fais aucune cuisson à l’huile d’olive, je n’utilise que du beurre qui à mon sens est plus neutre.

Est-ce que tu utilises d’autres huiles végétales ?

Non, par contre je fais souvent des infusions avec ton huile. En ce moment, j’ai des infusions au combava, au café jaune, au cédrat, une avec de la sauge, une autre à la fève tonka… Je l’utilise aussi beaucoup pour faire des vinaigrés. Par exemple, j’ai fait un vinaigré orange sanguine – rhubarbe avec de l’huile d’olive un peu de vinaigre de riz. L’huile d’Adravasti fonctionne super bien parce qu’elle a des notes vertes qui amènent de la tonicité.

Une idée de recette simple avec de l’huile d’olive à nous suggérer ?

Je passe du fenouil à la mandoline puis je le mets au frigo très froid. Ça lui donne une texture très ferme. On le mange avec un peu de zeste de citron, de l’huile d’olive et éventuellement un peu de poutargue.

 

39 rue Ramponeau, 75020 Paris
Ouvert du lundi midi au samedi soir.
On réserve au 01 80 06 45 64
(et on salue Julie de la part d’Adravasti !)

La liberté ou la mort / Ελευθερία ή θάνατος

 

Le 25 mars 1821 commençait le long chemin vers l’indépendance grecque.

Après quatre siècles d’occupation ottomane, plusieurs sociétés secrètes, les Hétairies, se réunissent en Grèce et à l’étranger pour fomenter une insurrection. Leur objectif est clair : rendre à la Grèce son indépendance. La plus active d’entre elles, la Philiki Etairia, avec à sa tête l’évêque Germanos de Patras est à l’origine du grand soulèvement populaire qui durera près de dix ans.

Les grandes puissances européennes reconnaissent la création de l’État grec avec le Traité de Londres en février 1830 mais laissent en dehors de l’île de Crète, malgré sa participation aux insurrections et la volonté affichée des insurgés crétois de rejoindre le nouvel État. Pour des raisons géopolitiques, les crétois devront attendre plus de quatre-vingt ans pour que la Crète soit officiellement rattachée à la Grèce en 1913.

« La liberté ou la mort » est la devise des insurgés. C’est elle qui se cache derrière le drapeau grec : chacune des neuf syllabes correspond à une des neufs bandes blanches et bleues.

Le 25 mars est un des deux jours férié en Grèce. Au défilé militaire à Athènes se joint celui des enfants en costumes dans toutes les villes et les villages.

Lundi dernier à Sitia, notre producteur Manolis a participé au défilé et à la danse traditionnelle : C’est le danseur à droite sur la photo !

Il pleut (beaucoup) / βρέχει (πολύ)

Alors que vous avez probablement passé une bonne partie du mois de février lunettes de soleil sur le nez, une fois n’est pas coutume, la situation en Crète a été bien différente.

Si je vous parle souvent de météo dans cette lettre, ce n’est pas pour faire la conversation mais bien parce qu’il s’agit d’un sujet pour le plus sérieux et déterminant pour nos oliviers. Il est d’ailleurs temps de faire intervenir un peu d’arithmétique :

  • Depuis le 1er janvier, il a plu 546 litres par mètres carré autour de Sitia. 
  • Sachant que chaque olivier occupe un espace d’environ 6m2, chacun a donc reçu 3 276 litres d’eau.
  • Rapporté à l’arrosage goutte à goutte, ces 3 276 litres représentent près de 34 jours d’arrosage continu !

Si vous n’êtes toujours pas convaincu.e du caractère exceptionnel de la situation, une simple comparaison finira cette démonstration: la ville la plus pluvieuse de France, Bayonne, a eu une pluviométrie de 397 mm sur les 2 derniers mois, soit près de 40% de moins ! (J’en profite pour saluer Jean-François, Camille et Steeven, nos parrains et marraines bayonnais.es).

Conséquence à court terme, la taille des oliviers a été décalée de quelques semaines. Le temps humide rend le travail de cicatrisation plus compliqué pour l’arbre, il vaut donc mieux attendre que le soleil soit de retour.

Sur le moyen terme, ces pluies sont évidemment une excellente nouvelle pour la future récolte. Les pluies de l’hiver, celles qui arrivent avant la floraison, sont très précieuses pour les oliviers.L’olivier gorgé d’eau est dans sa meilleur forme pour former des belles fleurs bien accrochées qui pourront après donner naissance au fruit : nos fameuses olives!

Voilà pour le positif. Malheureusement, ces fortes pluies ont aussi provoqué des dégâts importants. De l’autre côté de l’île de Crète, à côté de Chania, les pluies ont été particulièrement dévastatrices. Voici une vidéo du pont de Keritis à Alikianos datant de 1908 qui s’effondre en direct à la télévision (0:50).

Alors que le gouvernement promet une enveloppe exceptionnelle dédiée aux reconstructions, les initiatives citoyennes se multiplient elles aussi. À l’image de la lettre reçue par la municipalité de Platanias d’un groupe de migrants albanais qui se portent volontaires pour restaurer le pont de Keritis.

Voici le lien vers l’article : Albanian migrants volunteer to help restore historic bridge in Chania

Merci à Jean-Pierre d’avoir attiré mon attention sur cet épisode peu commun. 

Pauline Pérol

 

Ma cousine Pauline, c’est celle qui est derrière tout ce qui est beau,
en ce qui concerne Adravasti en tous cas.

Graphiste talentueuse, elle est diplômée de l’École de Design de Nantes. Fascinée par l’Asie, elle vit et travaille à Hong-Kong, après une étape de deux ans à Shanghai et une escale à Bali.

 

C’est elle qui a dessiné le logo d’Adravasti (que j’aime comme au premier jour) :

Et à peu près tout ce que qui se trouve dans vos colis :

Il était temps de lui rendre un petit hommage !

Martis, Μάρτης

 

Le Martis (Μαρτης) est un joli bracelet rouge et blanc que les enfants grecs portent tout le mois de mars afin de protéger leur visage des premiers rayons du soleil. Le dernier jour du mois, ou dès la première hirondelle, ils retirent le Martis pour le laisser sur un arbre fruitier. Il aiderait les oiseaux à faire leur nid.

Nikolaos Politis, pionnier de l’étude des folklores grecs, lie cette coutume aux origines mystérieuses au mythe de Déméter, la déesse de la terre.

Quand Perséphone est enlevée par Hadès, le roi des enfers, sa mère Déméter, désespérée, part à sa recherche et délaisse les cultures. Elle arrive déguisée en mendiante dans la ville d’Éleusis, près d’Athènes. Malgré son apparence modeste, le roi Céléos la reçoit avec respect et lui offre du vin et du fromage. Pour le remercier, elle lui enseigne l’art de l’agriculture et l’initie à ses “Mystères”. C’est  le point de départ d’une tradition, les fameux Mystères d’Éléusis, qui devient une des fêtes les plus célèbres et énigmatiques de la Grèce antique. Castors & Pollux, les fondateurs de Rome, ou encore le philosophe Hippocrate auraient fait partie des initiés.

On sait peu de choses des rituels respectés au cours de cette fête hormis que ses initiés portaient un bracelet rouge et blanc à leur main droite…

Dès le Vème siècle, l’Église Chrétienne considère la coutume du Martis comme idolâtre et l’interdit. Pourtant, encore aujourd’hui, la tradition est respectée partout dans les Balkans.

La blanc pur et le rouge joyeux s’associent pour fêter le printemps. La petite perle symbolisant un oeil veille sur les enfants.

Vous pourrez aussi en trouver dans mon épicerie crétoise. Ils sont réalisés à la main par Alexandra à Athènes.

Ses bracelets s’adaptent aux poignets des enfants comme des adultes et personne ne vous en voudra si vous décidez de ne pas en faire profiter les hirondelles et de le porter toute l’année !

L’idée de vous proposer ces Martis est née d’une collaboration avec Corinne, créatrice de My Greek Family. J’aurai l’occasion de vous reparler d’elle dans quelques mois puisque nous avons décidé d’organiser ensemble la 4ème édition du pop-up store “Comme un été en Grèce” qui réunit des artisans, créateurs, producteurs et même des écrivains.

Λίγο λάδι, λίγο δουλειά / Peu d’huile, peu de travail

Cette phrase pleine de bons sens, c’est la mère de notre producteur Manolis qui l’a prononcé. Une façon de relativiser la maigre récolte qui s’achevait prématurément mi-novembre.

La récolte est en effet une période épuisante, surtout quand elle s’éternise. Tout y est lourd : les filets, les perches, les sacs remplis.

Mais avant d’être un travail physique, la récolte est un savoir faire. Celui d’agencer les filets de façon logique et méticuleuse pour avancer rapidement d’arbre en arbre sans perdre d’olives. Celui de faire tomber les olives sans casser trop de branches ni écraser les fruits à terre. Celui de trier les feuilles des olives avant de mettre en sac.

Cette année, en raison de la grande sécheresse de l’hiver dernier, les arbres ont donné très peu d’olives. Ces années à maigre récolte, la possibilité que nous offrons aux producteurs de vendre leur huile à un prix juste prend tout son sens. Elle permet à Manolis d’appréhender plus sereinement l’année à venir… en attendant la pluie !

 

Les Coffrets de Noël 2018 !

  • Coffret χρόνια πολλά

Les essentiels crétois : Un bidon de 500ml d’huile d’olive bio et son bec verseur, un pot de 250ml de miel de thym, deux savons saponifiés à froid (romarin et sauge) et un sachet de 30g d’origan bio.

 

  • Coffret καλα χριστουγεννα 

Toutes les odeurs et saveurs crétoises : Deux bidons de 500ml d’huile d’olive bio et leurs becs verseurs, un pot de 250ml de miel de thym, trois savons saponifiés à froid (agrume, sauge et romarin) et 30g des herbes essentielles, origan, thym et sauge, cultivées en bio, évidemment.

 

Pour les commander, je clique ici !

το πανηγύρι / La fête du village

Tout l’été, les villages grecs vivent au rythme des « Panagia ». Depuis deux ans, notre village d’Adravasti est également au rendez-vous à l’occasion de la Saint Dimitri le 29 juillet. Alors que le village se vide peu à peu de ses dernier habitants, comme un pied de nez au destin, le village s’est doté d’une association dont la charge principale est de présider aux préparatifs de la fête. Et cette année pas moins de 200 personnes, habitants des villages alentour et quelques touristes, sont venues pour manger, boire et danser.

La semaine qui précède, les rues sont nettoyées, les maisons chaulées, les affiches annonçant le nom du musicien et de son groupe accolées aux poteaux électriques. Le grand jour, tout le monde est à son poste, impressionnant d’énergie et d’efficacité. Dans les coulisses, les femmes préparent à la chaine les assiettes de mezze. Le four à pain dans lequel sera cuit l’agneau chauffe. Une troupe de jeunes danseurs en costumes attendent leur tour dans un coin. Le chanteur et ses musiciens sont déjà sur l’estrade. Les voitures commencent à s’accumuler à l’entrée et à la sortie du village.

En Crète, la recette d’une fête réussie est toujours la même : un menu sans surprise – mezze, agneau et pommes de terre au four, sucreries au miel -, des danses crétoises qui réunissent les jeunes et les vieux, une loterie dont tous les tickets sont gagnants et beaucoup de raki. Folklore bien rôdé? Plutôt une leçon de vie en communauté insulaire soudée qui garde une profonde cohésion.

Petit reportage photo d’un jour pas comme les autres.

 

 

Rencontre avec Sophie Delpuech, oléologue

Le 19 juillet dernier, je me suis attablée avec Sophie Delpuech pour discuter d’huile d’olive. On parle d’arômes, de filtrage, de fruité vert et elle donne même ses conseils pour bien choisir son huile d’olive.

 

 

Comment es-tu devenue oléologue ?

Pour moi, cela s’est fait par étapes. Après un premier parcours professionnel assez diversifié, j’ai repris mes études et obtenu un master « histoire et culture de l’alimentation ». Ce diplôme m’a permis de donner des cours de culture culinaire à des étudiants étrangers. À l’époque, j’utilisais de l’huile olive sans vraiment connaître le produit. Suite à cette formation, j’ai aussi commencé à travailler pour une épicerie fine à Lyon spécialisée dans l’huile d’olive. J’y ai découvert ce produit dans sa richesse et sa diversité. Il y avait une très belle collection d’une quarantaine d’huiles étrangères et françaises. C’est là que j’ai plongé dans l’univers. J’ai eu l’envie de me former au produit depuis la culture de l’olive jusqu’au méthodes de trituration. J’ai suivi et obtenu le DU d’oléologie à l’université de Montpellier, le seul  qui existe en France. C’était passionnant, les intervenants étaient des conseillers techniques de l’AFIDOL, des spécialistes de la chimie de l’huile d’olive, de la trituration, des experts de la dégustation… C’était très ouvert de la partie culturale jusqu’à la dégustation. À la fin de ma formation, j’ai travaillé sur la mise en place de l’oléologie, mon idée était de proposer des ateliers au grand public.

Justement, quels sont les conseils que tu donnes pour bien choisir une huile d’olive ?

Tout d’abord, connaître la diversité des huiles. Il y a tellement de possibilités en termes de saveurs. Les participants aux ateliers sont souvent ébahis par la diversité des goûts. Cette découverte leur permet d’affiner leurs préférences. Il y a un monde entre des huiles fruité vert très intenses et des huiles fuitées « à l’ancienne ». Apprécier les différents fruités est important.

Ensuite, savoir appréhender le système de classification entre les huiles vierges et les vierges extra, les secondes étant plus durables que les premières. Il y a énormément de fraudes dans cette industrie, raison pour laquelle un jury note autant les propriétés physico-chimiques que les qualités organoleptiques des huiles, c’est-à-dire leur goût, selon les normes du Conseil Oléicole International.

« Vierge », « vierge extra », personne ne connait vraiment la signification de ces termes…

Oui, les gens sont perdus. La raison de cette distinction, c’est la protection contre les fraudes. L’huile d’olive représente 4% des huiles végétales consommées dans le monde mais 20% en termes d’échanges marchands. C’est un marché en pleine expansion et très lucratif. D’autant plus que de nombreuses études confirment aujourd’hui les bénéfices pour la santé qui étaient connus de façon ancestrale. C’est un produit formidable qui, avec les progrès au niveau de la production, devient un vrai produit gastronomique avec ses saveurs, ses typicités variétales et géographiques. L’idée de ces normes est de veiller à la justesse de ce marché qui attise les convoitises.

As-tu constaté un évolution des goûts chez les consommateurs ? En particulier chez les consommateurs éclairés ?

Oui, je l’ai constaté à travers mon expérience de vente dans l’épicerie fine puis lors des ateliers. Traditionnellement, les consommateurs français aiment les huiles plutôt fruité mur, pas trop intenses. Surtout pas trop amères ni trop ardentes [Note : l’ardence c’est le piquant, le côté poivré que l’on ressent en fin de bouche quand on déguste une bonne huile d’olive]. Dès que l’on s’adresse à des gens qui s’intéressent à l’huile d’olive et à qui l’on a fait goûter des huiles plus précises, avec des fruités plus intenses, à qui l’on a expliqué ce qu’est l’amertume, ce qu’est l’ardence et pourquoi c’est important pour la conservation du produit et pour le bénéfice santé, alors ils s’ouvrent. L’évolution que je constate est sur le fruité. Avec l’apprentissage, les consommateurs s’orientent naturellement vers des huiles de plus en plus puissantes et aromatiques. Quel que soit le type de fruité d’ailleurs, que ce soit fruité vert ou mur.

J’ai souvent l’impression qu’il y a une mode autour du fruité vert !

Favoriser le fruité vert est un biais d’experts ! Ce sont des saveurs qui se sont découvertes et installées ces dix dernières années. C’est lié au processus de trituration qui a évolué avec les chaines d’extraction continue et tout l’idée de récolter les fruits plus verts, justement pour arriver vers ces saveurs là très herbacées au détriment du rendement. C’est donc à la fois la technologie, l’intérêt des producteurs et la grande complexité aromatique de ces huiles.

Quand on déguste, on goûte le fruité [Note : les arômes], l’amertume et l’ardence. Quels sont les facteurs d’apparition ?

Le fruité est lié au terroir et au fruit mais il se développe au moment du malaxage. Ce sont des réactions enzymatiques au moment du malaxage qui développent le fruité. L’amertume vient du fruit, de la variété et du degré de maturité. Mais en ce moment je m’intéresse au processus au moulin et son impact sur les arômes. Par exemple, un producteur m’a dit qu’en modulant la vitesse de broyage il arrive à jouer sur le niveau d’amertume. À investiguer ! L’ardence est liée à l’extraction et plus précisément à la quantité d’eau utilisé dans le processus : plus on utilise de l’eau plus les composés phénoliques qui sont hydrosolubles vont avoir tendance à se dissoudre dans l’eau.

Combien d’huiles d’olive différentes goûtes-tu par an ?

Je suis jury dans des concours donc déjà rien que pour la présélection de l’AVPA [Note : l’Association pour la Valorisation des Produits Agricole] on a plus de deux cent huiles, pour le concours olive d’or à Montréal on avait cent cinquante huiles, ce à quoi on ajoute tous les concours nationaux et régionaux. Plus tout le reste, je suis à plus de cinq cent par an !

Quel est le meilleur moment dans la saison pour consommer une huile ? On entend souvent que c’est six mois après la récolte, pendant l’été…

Toute l’année ! J’adore les huiles de la nouvelle récolte, il y a l’excitation de la découverte, l’intensité de l’ardence et de l’amertume mais je suis très curieuse et amatrice de vivre l’évolution des huiles toute l’année. Je prends des notes pour chaque huile que je goûte plusieurs fois dans l’année et je les vois évoluer. Pour les huiles que je suis, c’est intéressant sur la qualité de l’huile : à quelle rapidité elle évolue, vers quoi elle évolue. C’est un indice très important de la qualité réelle du produit et du travail du producteur. Il y a des huiles qui sont merveilleuses en janvier et qui ne donnent plus rien en mai, c’est dommage.

Qu’elle est ta position sur le filtrage ? Si tu devais faire ta propre huile demain, tu filtres ou tu filtres pas ?

Je filtre ! C’est un sujet très vaste et beaucoup ne sont pas d’accord. Certains mettent en avant que l’huile d’olive est un produit de terroir et qu’à l’origine on ne filtrait pas les huiles. Cette dernière année il y a aussi eu un effet de mode au point que Carapelli va lancer une huile non filtrée. Mais les risques sont de laisser dans l’huile des micro-particules d’eau et des micro-particules végétales qui en anaérobie dans la bouteille peuvent rentrer en fermentation. C’est le risque de défaut de lie. Il est à mesurer à l’aune de tes réseaux de distribution. Plus tu distribues loin et de grandes quantités, plus tu prends des risques. Par ailleurs, les huiles non filtrées ont tendance à s’effondrer au niveau du fruité avec le temps.

Qu’est ce que t’évoque la variété Koroneiki [Note : la variété de l’huile d’Adravasti]?

Elle m’évoque la rose. C’est une des variété que j’arrive très facilement à reconnaître car ses descripteurs aromatiques sont ancrés dans mon répertoire mental autour des arômes de la rose et du foin. J’aime beaucoup sa délicatesse.

Quelle est ton utilisation quotidienne de l’huile ? Ta petite recette préférée ?

Au petit déjeuner, sur une tartine avec du cottage cheese.

Un souvenir de dégustation ?

J’aime l’exercice de la dégustation car c’est un exercice intellectuel intense. C’est intéressant de pousser son intellect. Au bout d’un moment, ton palet est tapissé et j’aime aller jusqu’au moment où ton cerveau ne connecte plus les arômes.

Une oliveraie qui t’a marquée ?

J’ai un producteur chouchou en France qui s’appelle Éric Martin du domaine La Magnanerie en Ardèche. Il fait des huiles bio, fruitées vertes. C’est un fou des arbres, il aime ses arbres et ses vergers avec toute une recherche sur l’enherbement, les variétés d’herbes. Son oliveraie est magnifique.

Ton huile préférée ?

C’est compliqué parce que j’aime la diversité. L’huile dont je ne me laisse jamais, c’est la Primo de Frantoi Cutrera qui est l’huile de ma sauce de salade. Fruité verte avec des arômes d’herbe coupée produite en Sicile. Je l’ai toujours dans mon placard. Dans les dernières découvertes, j’ai beaucoup aimé la Cima di Mola de chez Pietro Intini, c’est une huile des Pouilles, une vieille variété endémique dont les arbres ont été remis en culture par la famille Intini. C’est une huile originale à découvrir.

 

La dégustation de l’huile biologique de Manolis Lantzanakis, Piskokefalo récoltée en novembre 2017

 

Au nez, je perçois des herbes aromatiques, les odeurs de la garrigue, du thym, du romarin, de la sauge. En bouche, il y a un peu d’amertume, un peu d’ardence. Si au nez le fruité est expressif mais peu intense, en bouche les arômes sont très présents. Il y a aussi une grande longueur en bouche. Je ressens la sauge et la rose, typique de la variété koroneiki. J’aime beaucoup son équilibre entre l’amer et l’ardence. C’est un bon exemple d’une huile douce qui a une vraie personnalité avec des arômes plaisants et solides, d’autant plus solides que nous la dégustons en juillet. Pour la décrire, je dirai que c’est une huile douce au fruité délicat avec un présence discrète d’amertume et d’ardence.

Retrouvez Sophie sur : www.loleologie.fr, sur son blog extrahuiledolive.com et sur Facebook

Qualifiée lors d’un championnat de dégustateurs, Sophie est désormais membre des « Associate Savantes » de l’association internationale de dégustateurs d’huiles d’olive SAVANTES. Elle organise des ateliers de dégustation et des cours d’oléologie pour amateurs et professionnels (www.loleologie.fr) et promeut une approche hédoniste de la dégustation d’huile d’olive ainsi que la production d’huile Vierge Extra de qualité.

Les savons de Brigitte / Τα σαπούνια της Μπριζιτ

 

Brigitte et Bertrand ont quitté la Belgique en 1994 pour la Crète, sa nature sauvage et ses paysages. Après 6 mois de randonnée, ils découvrent l’Est de l’île grâce à la récolte des olives qui leur offre leur premier boulot. Ils y restent et achètent bientôt leurs propres oliviers. Deux merveilleuses petites filles plus tard, ils comptent aujourd’hui parmi les plus importants producteurs d’huile d’olive biologique de la région. De l’huile d’olive oui mais aussi des savons depuis que Brigitte a suivi une formation à la saponification à froid et qu’elle a installé un petit atelier derrière leur maison.

Lors de notre première rencontre, j’ai été impressionnée par la conviction qu’ils mettent à produire de façon naturelle. Bluffée aussi par la force de leurs engagements que l’on retrouve dans leur mode de vie : économies d’eau, d’énergie, pas de gaspillage, la cohérence est totale. Par la suite, j’ai été très touchée par la tendresse et l’unité que l’on ressent quand l’on passe du temps avec cette petite famille.

Logiquement, la base de ses savons, c’est donc l’huile d’olive. Brigitte utilise le marc d’olive c’est à dire ce qui reste au fond de la cuve, une fois que l’huile a reposé deux mois. Méthode anti-gaspi ET bénéfique pour les savons car ce marc liquide est très riche et nourrissant.

Autre éléments essentiel à leur réalisation : la soude caustique. Elle la mélange à de l’eau distillée ou à des hydrolats réalisés par ses soins puis à l’huile d’olive, le tout chauffé à 40°C. Dès que la pâte de savon refroidit, elle y ajoute des huiles essentielles, des fleurs ou des épices.

Enfin, les savons sèchent tranquillement pendant 4 à 6 semaines : c’est ce temps de séchage long qui donne son charme à la saponification à froid.

Au fait, quel est l’intérêt de la saponification à froid ?

Pour raccourcir drastiquement le temps de séchage, on peut réaliser les savons à chaud. Dans ce cas, le savon est cuit pendant 10 jours à plus de 100°C. Il est ensuite lavé à grande eau pour retirer l’excès de soude, ce qui a aussi pour effet d’extraire la glycérine. Saponifier à froid, c’est donc bénéficier de la glycérine naturellement issue de la réaction chimique. Pourquoi c’est important ? Car c’est justement la glycérine qui confère au savon son pouvoir hydratant. Cela permet aussi de conserver toutes les propriétés des huiles essentielles ou des fleurs utilisées. Enfin, c’est l’occasion d’avoir un savon « surgras » car pour s’assurer que toute la soude réagisse, Brigitte introduit l’huile d’olive en excès. Une légère couche d’huile d’olive reste alors en suspend et qui viendra plus tard hydrater votre peau.

Pour découvrir toute l’histoire de Brigitte et Bertrand, je vous recommande d’aller fair un tour sur le site internet : http://www.lenika-couleur-olive.com/

 

PS : Bonne nouvelle, ses savons sont maintenant disponibles sur notre épicerie crétoise, accessible en cliquant ici 😉

La salade grecque / Χωριάτικη σαλάτα

En Grèce, il y a une chose avec laquelle on ne rigole pas : les ingrédients de la χωριάτικη, la salade grecque ou litteralement la salade du village (χωριό en grec).

  • Tomates
  • Concombre
  • Oignon
  • Poivron
  • Origan
  • Feta
  • Olives noires
  • Huile d’olive

Quand la feta a du goût, les tomates sont bien mûres et l’huile d’olive abondante, c’est un vrai délice. Et quand on la mange à l’ombre de notre accacia dans notre χωριό, Adravasti, c’est presque le paradis.

Kellaria / Κελλάρια

Souvenirs d’une ballade dans le village voisin

À deux kilomètres d’Adravasti se trouve le village de Kellaria. Encore plus petit que celui qui donne son nom à notre projet, il s’accroche lui aussi à la montagne, domine lui aussi une mer d’oliviers et souffre lui aussi de l’exode des plus jeunes. Des différences quand même. L’église de Kellaria se trouve en amont du village, plus pratique que celle d’Adravasti qui se niche tout en haut, obligeant les fidèles, souvent très âgés, à prouver leur foi à chaque messe en gravissant la montée.

En s’y promenant, on fait la rencontre de la malicieuse Vangelia. À 84 ans, c’est la plus jeune du village. Il faut dire que seuls 7 survivants y vivent encore toute l’année. « J’ai appris la solitude » . Son fils vit à Athènes mais pas question pour elle de quitter sa maison. Elle nous montre sa vue imprenable et nous la félicitons pour la blancheur de sa maison et la beauté de son citronnier.

Nous grimpons un peu plus haut dans le village. Les maisons sont en ruines mais elles n’en sont pas moins belles. Colorées par la terre rouge de la montagne, elles regorgent de trésors secrets. Nous y découvrons avec émotion de très anciennes photos. Sur les cadres, tous posent avec plus ou moins d’audace. Un mariage, une profession de foi ou simplement l’occasion saisie d’avoir un photographe de passage. C’était au XXème siècle mais c’était un autre monde.

L’envers du bidon

Aujourd’hui on ne s’intéresse pas au contenu mais au contenant ! Nos bidons métalliques auxquels on tient beaucoup en raison de leurs avantages environnementaux et gustatifs sont produits à Heraklion dans l’usine de Kretacan à qui on a rendu visite. Et pour la première fois cette année, notre design a été directement imprimé sur les bidons. Petite visite guidée.

On imprime le design de nos bidons sur de grandes feuilles métalliques d’un mètre sur un mètre.

On commence par les couper avant de pouvoir les plier.

Chez Kretacan, la production est semi-automatique. Il faut au moins 6 personnes pour faire tourner les machines !

Ateliers Heureux les Curieux x Adravasti

Dans le cadre du partenariat avec Heureux les Curieux, plusieurs ateliers et formations sont organisés au 23 rue du Pont aux Choux dans le 3ème arrondissement de Paris.

  • Formation à la dégustation d’huile d’olive 

Samedi 24 mars : 12h, 18h
Dimanche 25 mars : 12h, 15h, 18h
Durée : 30 minutes
Gratuit
  • Huile d’olive et vin – À la rencontre du terroir aromatique méditerranéen

 

Mardi 3 avril : 18h30
Durée : 1h30
Prix : 40€
  • À la découverte de l’apiculture urbaine

 

Samedi 7 avril : 12h, 15h
Durée : 1h
Prix : 40€
Pour vous inscrire, une petit mail à manon@adravasti.fr ou un coup de fil au 06 98 88 66 10 !
À très vite,
Manon

 

La taille des oliviers / Το κλάδεμα της ελιάς

En Février, alors que les retardataires finissent la récolte, la plupart des producteurs s’attèlent à la taille des oliviers.  On commence par retirer les branches sèches, qui ne donneront plus d’olives. Puis, on élague de façon à laisser le soleil pénétrer uniformément. On coupe aussi les branches les plus hautes pour se faciliter la récolte prochaine, ce qui explique d’ailleurs la forme tassée des oliviers. Enfin, on s’assure que l’arbre n’empiète pas sur l’espace de ses voisins.

L’olivier fournit de l’huile… et le bois pour se chauffer l’hiver !

Une fois la taille effectuée, il faut brûler les branches trop fines pour en faire du bois de chauffe. Si les feuilles sont souvent laissées au pied de l’arbre car elles agissent comme un engrais naturel très efficace, il est important de brûler les petites branches sous peine d’en faire de véritables nids à mouches !

Contrairement à de nombreux arbres, l’olivier ne perd pas ses feuilles d’une année sur l’autre. Ces économies d’énergie permettent à ce petit arbre d’afficher une longévité qui ferait pâlir de jalousie certains chênes  – en Crète, on compte de très nombreux oliviers millénaires ! C’est notamment pour respecter la logique propre à cet arbre magique que nos producteurs taillent les arbres de façon mesurée.

Ils ont sûrement reçu une tronçonneuse à Noël

D’autres en revanche n’hésitent pas à laisser les arbres tous nus. Cela permet d’avoir des “super-récoltes” tous les 3 ans et réduit l’incertitude des rendements. “Il faut leur pardonner, ils sont ignorants… et ont sûrement reçu une tronçonneuse à Noël” se moque Virginie, notre productrice, sans cacher son amertume face à ces pratiques très destructrices sur le long terme.

Le feu : la dernière étape après 4 mois à transpirer dans les oliviers. On comprend que nos amis producteurs aient le sourire !

Un de nos jeunes oliviers après la taille.

Massacre à la tronçonneuse : un exemple de ce qu’il ne faut pas faire !