Les pieds sur terre, la tête dans les olives

Après le vent (article que vous pouvez retrouver par ici), je continue cette série sur les éléments. Au menu du jour : la terre.
Le monde de la vigne nous a appris que chaque terroir influence à sa manière les arômes et la qualité de la production. Qu’en est-il de l’huile d’olive ? On pressent que chacune doit à la terre où poussent les oliviers. Creusons donc (littéralement) un petit peu pour en savoir plus…


Une chose est sûre, l’olivier est taillé pour la Méditerranée. Il aime les terrains secs et ne supporte pas les terrains humides dans lesquels l’eau circule trop lentement. Autrement dit, la Normandie, ce n’est pas pour tout de suite. Au contraire, il raffole des terrains pentus. On sait aussi qu’aux terres trop argileuses et asphyxiantes, il préfère les sols filtrant, caillouteux.
Quand on se balade à l’Est de la Crète, ce qui frappe en premier, c’est la couleur de la terre : un rouge ocre dont la poussière colore les ruines des villages. Cette couleur s’explique par à un fort taux de fer dans la terre. La ferrite a une action très positive car elle retient les minéraux comme le calcium, le phosphore, le potassium ou encore le magnésium.
Autour d’Adravasti, le sol peut être à dominante calcaire, schisteuse ou sablonneuse. Les montagnes de Crète, souvent très calcaires, sont rarement un bon terroir pour l’olivier, pour le plus grand plaisir des chèvres et moutons qui en ont fait leur terrain de jeu. En revanche, les plaines avec ses terrains schisteux sont de très bons « ladotopo », c’est à dire « terrains à huile ». On reconnait le schiste à l’aspect feuilleté de sa roche, qui prend un aspect « mille-feuille ». Vous trouverez un exemple photographique ci-dessous. Le schiste se forme avec la sédimentation d’argile, souvent en milieu marin. Très friables, les sols schisteux permettent aux oliviers d’enfoncer leurs racines profondément. Justement, de nombreux oléologues voient dans cette capacité à puiser loin dans le sol un élément central du développement d’arômes puissants.



Comparativement à la vigne, l’analyse des sols et de leur impact sur les arômes est encore peu développé dans l’huile d’olive. Mais on sait que le pH de la terre est d’une grande importance et vient parfois contredire les ambitions d’implantation de variétés étrangères sur un territoire. La récente passion des Japonais.e.s pour l’huile d’olive nous a permis d’avancer dans ce domaine. Fidèles à leur réputation, ils et elles ont poussé l’art de la précision jusqu’à analyser des milliers d’endroits au Japon afin de retrouver celui qui correspond précisément au sol de domaines en Toscane où sont produites de prestigieuses huiles d’olive. L’expérience avait d’ailleurs déjà été menée avec la Romanée Conti. Vous trouvez que cette façon manque un peu de poésie ? C’est aussi mon avis, mais ça reste entre nous.



Merci à Pierre pour la photo, au président de la coopérative de Zakros, à Jeanne ainsi qu’à Brigitte et Bertrand pour m’avoir aidé à y voir plus clair dans ce sujet charbonneux.