Confiné.e.s dans l’huile – Épisode 2
Au sommaire en ce dimanche qui n’a pas du tout l’air d’un dimanche :
- Je vous dis tout sur les tamatas, ces jolis ex-voto grecs
- Une suggestion pour une activité créative en famille : et si vous faisiez vos propres tamatas chez vous ?
- Sainte Paraskeve ça ne vous dit rien ? C’est le moment pour en savoir plus sur la moins racunière des Saintes
Hakuna Tamata
Depuis l’Antiquité, en Grèce peut être plus qu’ailleurs, les hommes et les femmes n’ont jamais cessé de faire des offrandes à(aux) Dieu(x) pour s’assurer ses(leurs) bonnes faveurs.
Dans les chapelles orthodoxes, vous trouverez des murs entiers recouverts de petits rectangles en métal découpé représentant une personne aimée, des yeux, un bateau ou encore un militaire en uniforme. Ils implorent la renaissance d’un amour perdu, la guérison miraculeuse d’un organe ou le bon retour d’un marin.
Alors que dans la tradition catholique, les demandes intéressées sont symbolisées par un cierge allumé ou une pièce déposée, cette tradition prend en Grèce une forme beaucoup plus visuelle :

Le τάμα (de τάζω, promettre) est ce morceau de métal adressé à Dieu, à un Saint ou une Sainte. Ces petits contrats avec une divinité qui décorent les chapelles cachent mille et une histoires singulières. Simple précaution, une façon de dire « on ne sait jamais » ou dernier espoir, comme pour se résoudre « si dieu ne peut rien y faire, c’est que c’est bien foutu ».
J’aime beaucoup m’arrêter sur ces ex-voto naïfs dans les chapelles crétoises et en ces temps troublés, il me reviennent en tête.
Alors on s’y met nous aussi ! En plus, ça nous donne l’occasion d’en faire une super activité créative en famille.

À vos voeux, prêts, partez
Pas besoin de métal : On prend une feuille de papier, des feutres et du ruban si on en a sous la main et c’est parti !
Proposez à vos enfants de dessiner ceux ou celles qu’ils ou elles veulent protéger, les personnes qui leur manquent ou toutes ces jolies choses que l’on rêve de refaire. En ces temps de confinement, on peut imaginer des tamatas évoquants la mer, des paysages sauvages, le parc d’en bas, un anniversaire plein d’enfants ou un ballon de foot.
Voici ce que ça donne chez nous. Réalisation d’Achille, 4 ans, très porté sur le football !
Elle vous a à l’oeil
À l’instar de Saint Antoine de Padoue chez les catholiques, Sainte Parascève (en grec Αγία Παρασκευή, littéralement Sainte Vendredi) est certainement la plus sollicitée des Saints et Saintes ! Guérisseuse des aveugles, c’est peu de dire qu’elle doit posséder une une bonne collection de tamata chez elle*.

Parascève naît dans la région de Rome au IIe siècle après JC. Belle et bien éduquée, les prétendants ne manquent pas ! Mais faire un beau mariage est la dernière de ses préoccupations. Elle veut consacrer sa vie au Christ et le dit au et fort… Ce qui n’est pas au goût de l’empereur romain Antonin le Pieux qui la convoque pour lui ordonner de mettre un terme à sa campagne d’évangélisation. On a beau être empereur, tout ne va pas toujours comme on veut : une fois face à elle, il tombe sous son charme et la demande en mariage. Le refus de Parascève signe le début de ses ennuis. Elle est enfermée et torturée mais semble protégée par sa foi. La curiosité autour de cette jeune martyre grandit alors. Pour se débarrasser d’elle une bonne fois pour toutes, elle est jetée dans une marmite d’huile bouillante. Le miracle arrive au bon moment ! Au lieu d’être ébouillantée, elle semble au contraire rafraîchie par le liquide en ébullition. Antonin s’approche pour constater de lui-même cette sorcellerie et c’est là qu’elle en profite pour lui asperger le visage d’huile chaude. Aveuglé, il la supplie de lui venir en aide. Pas rancunière pour un sou, elle accepte et lui rend immédiatement la vue. Antonin la libère mais elle sera de nouveau emprisonnée puis décapitée sous le règne de Marc Aurèle.

En souvenir de la guérison miraculeuse de l’empereur Antonin, elle est depuis la Sainte protectrice des yeux.
La Sainte Parascève est célébrée le 26 juillet dans les nombreux villages Grecs qui portent son nom, notamment celui qui se trouve dans la banlieue nord d’Athènes ou sur l’île d’Amorgos dans les Cyclades. Grandes tablées, processions et danses traditionnelles sont au programme !
* on me glisse à l’oreille que, comme beaucoup d’entre vous, elle profite du confinement pour faire le tri dans 19 siècles de tamatas reçus.
Je vous souhaite à tous d’être protégé.e.s par
tous les Saints et les Saintes du monde !

😉