Cinquante nuances de tzatziki

Si on ne peut affirmer que le tzatziki (τζατζίκι) est le mezze le plus commandé dans les tavernes en Grèce, il est certainement le plus connu en dehors des frontières grecques.

Ce succès international est encore plus impressionnant quand on s’aperçoit que l’on retrouve des variations de cette recette à base de yaourt un peu partout au Moyen et Proche Orient. Sous les noms de djadjik en Turquie ou labné au Liban, chaque pays de l’ancien Empire Ottoman semble avoir conservé une version locale du tzatziki. En suivant les frontières de l’Empire Ottoman, on peut cartographier cette incroyable intégration culturelle à travers la gastronomie.

J’ai regroupé pour vous ces cinquante nuances de tzatziki, avec leurs dénominations locales, sur la carte ci-dessous :

Vue de la France, la Grèce est européenne. Son influence sur notre régime politique ou sur le vocabulaire médical (entre autres !) crée une grande familiarité entre nous autres occidentaux et le peuple grec. Mais en s’attardant sur sa gastronomie, c’est son ancrage oriental qui saute aux yeux. Les pays de l’ex-Empire Ottoman – que nous appellerons entre nous la “communauté de la baklava” – continuent de partager un grand nombre de références culinaires : le tzatziki ou les baklava, déjà cités, mais aussi les souvlaki (brochettes de viande) ou encore les alcools comme le raki. Une proximité gustative qui n’empêche pas les conflits, on l’aura compris…

La recette :

Râpez le demi-concombre avec une grosse râpe, salez-le et faites-le dégorger pendant une heure. Vous pouvez aussi accélérer le processus en appuyant avec le dos d’une cuillère sur votre concombre râpé, personne ne vous en voudra. Mélangez-le avec le yaourt, puis, dans un mortier, écrasez l’ail avec du sel pour obtenir une pâte que vous ajouterez au mélange de yaourt. Il vous suffit alors d’ajouter la menthe, l’aneth et l’huile d’olive avant de déguster bien frais. 

Mais au fait, comment on s’est retrouvé.e.s à parler de tzatziki ?!

J’y venais ! 

Toute la semaine, je m’associe au restaurant Barak qui propose une recette de tzatziki maison à l’huile d’olive d’Adravasti pour agrémenter ses salades et sandwichs. Barak s’inspire de la cuisine de la Méditerranée pour proposer des plats colorés conçus pour une pause déjeuner rapide et pour l’occasion, nous avons réalisé une interview où je vous parle… d’huile d’olive, sans surprise. Vous pouvez vous abonner à mon compte Instagram ou à celui de Barak, nous posterons l’interview au fur et à mesure cette semaine. 



La Vasilopita / Η Βασιλόπιτα

Texte de l’association Phonie-Graphie que l’on remercie !

Les fêtes traditionnelles ont pour la plupart une origine paysanne, surtout dans une époque d’exode rural. Dans les campagnes, la « Vassilopita » se préparait à l’aube de la fête de Saint Basile c’est-à-dire le 1er janvier, le jour de l’An. En Grèce en effet c’est la Saint Basile (΄Αγιος Βασίλειος, Αï-Βασίλης) et non le Père-Noël qui apporte les étrennes aux enfants et qui donne son nom à la galette, la Vassilopita (Βασιλόπιτα). La tradition du pain festif se trouve déjà dans l’antiquité, culte de Déméter ou dédicace à d’autres dieux ou démons auxquels on l’offrait pour obtenir santé et puissance. De même, lors des Saturnales grecques ou romaines, une monnaie cachée dans un gâteau était signe de chance pour celui qui la trouvait et devenait le « roi de la fête » (Cf. Βασίλης-Βασιλιάς).

Les dates de fête de célébration des douze jours, de Noël à l’Epiphanie, sont très proches de celles de la période pré-chrétienne où les cieux de la chance s’ouvraient et où l’année changeait. Certes, les brioches paysannes consacrées au Christ et les petits pains en forme de couronnes que les bergers préparaient pour la Saint-Basile étaient déjà des porte-bonheur augurant santé et puissance pour la nouvelle année. Ils contenaient aussi une pièce de monnaie, signe de richesse pour celui qui la découvrait. La cérémonie elle-même avec son partage hiérarchique est peut-être venue avec les Croisés. On retrouve en effet des coutumes semblables chez les Français et les Belges dès le XIIIème siècle.

Outre son caractère de bon augure, la pièce de monnaie a également un sens magique et religieux comme l’or, l’argent et en général les couleurs brillantes qui conjurent de surcroît le mauvais sort. Dans la maison on la garde près des icônes.

Elle transmet sa qualité magique de fertilité et de bien-être au gâteau tout entier dont on lance des morceaux dans les champs et les vergers, tandis que les jeunes filles en placent sous leur oreiller pour voir en rêve leur futur fiancé.

Des récits concernant différentes provinces attestent d’une grande richesse cérémonielle. En Thrace orientale par exemple, où en plus de la pièce on joignait dans la pâte un grain de raisin, un grain de blé, un brin de paille pour les vaches, etc. Une autre explication issue des synaxaires, récits de la vie des saints, nous vient d’Asie Mineure. Alors que Saint Basile était évêque de la Césarée, le préfet de Cappadoce prit des mesures draconiennes pour percevoir les impôts. Epouvantés, les habitants rassemblèrent ce qu’ils avaient de plus précieux pour l’offrir au préfet. Radouci par ce geste, ce dernier refusa les présents et les invités s’en retournèrent tout joyeux. Mais comme il était difficile de restituer à chacun ses cadeaux dont beaucoup se ressemblaient, Saint Basile eut recours à une solution magique : il plaça les objets à l’intérieur de petits gâteaux qu’il distribua. Et – ô miracle – chacun retrouva ce qu’il avait offert.

Cette coutume de tirer les rois s’est répandue dans nombre de pays. Mais sans prendre l’ampleur qu’elle a en Grèce où, sortant du cadre familial, elle s’est étendue aux cercles socioprofessionnels.

Souhaitons qu’elle se maintienne et conserve son caractère populaire et traditionnel.

Du sucre plein les doigts

Les kourabiedes sont des biscuits préparés pour Noël à base de beurre, de farine, d’amandes et… beaucoup de sucre glace. 

Ils sont inspirés d’un gâteau truc, le kurabiye à base d’amande. Une preuve de plus que la culture du sucrée en Grèce doit beaucoup à leurs voisins-ennemis ottomans (comment vivrait-on sans baklava ?!). Devenus les biscuits traditionnels de Noël, ils sont souvent en forme de croissant et un clou de girofle peut être ajouté sur le dessus. Il représente le don des épices fait par les Rois Mages à Bethléem. 

En voici la recette :

INGREDIENTS

  • 500 g de beurre de brebis (à température ambiante) – ou de beurre de vache si vous n’en trouvez pas
  • 200 g d’amandes, émondées et grillées
  • 300 g de sucre glace
  • 650 g de farine
  • 30 ml de brandy (que l’on peut remplacer par du rhum ou de l’ouzo)
  • ½ cuillère à café d’essence de vanille

Pour le glaçage

  • 2 cuillères à soupe d’eau de fleur d’oranger (ou d’eau de rose)
  • 300 g de sucre glace

INSTRUCTIONS

  1. Blanchir, puis griller les amandes dans un four préchauffé à 180 degrés, pendant environ 20 minutes. Laisser refroidir, puis couper grossièrement en petits morceaux.
  2. Tamiser le sucre. Puis tamiser la farine séparément.
  3. Battre le beurre avec le sucre glace à vitesse lente jusqu’à incorporation, puis battre à vitesse rapide pendant dix minutes jusqu’à ce que le mélange devienne blanc et mousseux. Ajouter le brandy et la vanille et mélanger.
  4. Arrêter le mélangeur. Changer le crochet et attacher le crochet à pâte. Ajouter les amandes et continuer de mélanger. Ajouter la farine progressivement jusqu’à ce que la pâte soit molle mais non collante aux mains.
  5. Vous pouvez utiliser un emporte-pièce ou façonner les biscuits à la main en boules rondes ou croissants et les placer espacées, sur une plaque de cuisson recouverte de papier sulfurisé.
  6. Cuire au four pendant environ 12 minutes, selon votre four. Ils seront un peu mous, mais se raffermiront une fois refroidis.
  7. Retirer du four et laisser refroidir.
  8. A l’aide d’un pulvérisateur, vaporiser avec de l’eau de rose ou de fleur d’oranger sur les deux côtés des biscuits.
  9. Retourner les biscuits sur une surface sèche et en utilisant un tamis, saupoudrer de sucre glace. Retourner les biscuits à nouveau et continuer à saupoudrer jusqu’à ce qu’ils soient entièrement recouverts.

Paximadi (παξιμάδι), beaucoup plus que du pain dur

Le village d’Adravasti n’a beau compter qu’une grosse dizaine d’habitants, ses survivants n’ont pas renoncé à la magnifique tradition du paximadi (παξιμάδι). Une à deux fois par an, ils se réunissent et, sous la direction de Ririka, réalisent en grande quantité ce pain à base d’huile d’olive, de farine d’orge et de blé. 

Toute l’année, le paximadi se consomme dur et pour s’assurer de sa conservation, il est cuit deux fois dans l’imposant four à bois du village.

Les pains sont façonnés sous l’oeil vigilant de Ririka
Le four du village, Nikos à la manoeuvre
Après la première cuisson (à droite)
L’occasion de se retrouver toutes et tous
Toutes ces photos ont étés prises dans le mois dernier à Adravasti.
Merci Jean-Pierre et Pierre pour ce super reportage !

Ce pain doit son nom au crétois Pàxamos auteur de nombreux livres de recettes de cuisine au 1er siècle après JC !

Sous l’ère byzantine (IVème au XIIIème siècle), le nom de Pàxamos est synonyme de nourriture de qualité. Puis, au fil du temps, ce pain facile à réaliser devient l’ingrédient de base des populations des campagnes. Le paximadi est alors associé à la ruralité et même à la pauvreté. 

Sous l’occupation des vénitiens (1204-1669), on impose aux crétois de produire de très grandes quantités de paximadi pour nourrir la flotte de l’armée vénitienne. Il a même au sein de l’armée, une troupe dont la mission exclusive est d’acheminer le paximadi !

Dans les monastères, tandis que les moines ont droit au pain frais, les plus jeunes recrues doivent se contenter de paximadi. C’est aussi, avec les fruits, la seule nourriture tolérée pour les ermites. Pour ces raisons, les monastères crétois ont une grande tradition de fabrication du paximadi. Le monastère de Toplou, à quelques kilomètres de notre village, est encore aujourd’hui réputé pour la qualité de son pain dur. 

C’est ce pain que l’on utilise pour la recette du Dakos (ντακος) – le mezze typiquement crétois que ma soeur Léa voulait toujours commander au restaurant.

Et comme je suis là pour vous faire plaisir, en voici la recette (ULTRA simple ET délicieuse) 

  • Du paximadi (que vous pouvez remplacer par des biscottes suédoises ou du pain de campagne grillé)
  • Une grosse tomate bien mûre (dans quelques mois !) ou une boite de tomates concassées de bonne qualité
  • Un oignon nouveau émincé ou une petite moitié d’un oignon rouge émincé très finement (selon vos préférences)
  • Feta émiétée (au moins 3 cuillère à soupe – il n’y en a jamais trop !)
  • 1 cuillère à soupe de vinaigre (de cidre ou de vin)
  • 1 cuillère à soupe de miel 
  • Origan
  • Basilic frais
  • Quelques grosses olives noires 
  • et de l’huile d’olive !

Recette :

Couper la moitié de la tomate en cube et râper l’autre moitié. Dans un bol, mélanger : la tomate rapée, le vinaigre, le miel, le sel, le poivre, le basilic finement haché et l’origan. Corriger l’acidité ou le sucre à votre goût. Verser le mélange sur les pains et ajouter un bon filet d’huile d’olive. Ajouter la tomate hachée et l’oignon émincé puis la feta émiétée et enfin les olives dénoyautées. On peut aussi ajouter quelques câpres. Juste avant de servir, on rajoute un filet d’huile d’olive et un tour de moulin à poivre. 

La feta / Η φέτα

En avril commence la saison de… la feta ! Même si cela ne se retrouve pas toujours dans nos habitudes et qu’il m’arrive d’acheter de la feta au supermarché au mois d’octobre, elle est produite entre janvier et mai et affinée trois mois minimum ce qui nous amène à une saison de dégustation d’avril à décembre. Pourquoi ? Tout simplement car le goût du fromage est étroitement lié à l’alimentation de la brebis. 

Quand je pense à la feta, je pense à l’épicerie de Βιβι, sur la place de Zakros. Chez elle, j’achète du pain, des biscuits γεμιστα et de surtout de la feta. Βιβι s’équipe d’un gant et plonge sa main dans le gros bidon. À Zakros, la feta s’achète à la coupe et a un goût puissant et acidulé. 

Si fiers quand il s’agit de leur patrimoine, les grecs ont mené une bataille juridique épique pour obtenir l’AOP et interdire donc ces “fetas” produites au Danemark à base de lait de vache. 

Quelques liens pour aller plus loin :

Où acheter de la bonne feta ?

Deux adresses à Paris : 

  • Le top se trouve chez Profil grec justement, 7 rue de Savies dans le 20ème
  • Pour ceux à la recherche du meilleur rapport qualité prix, l’épicerie méditerranéenne Épices et saveurs, 2 Avenue Parmentier dans le 11ème, a une super gamme pas très chère

La salade grecque / Χωριάτικη σαλάτα

En Grèce, il y a une chose avec laquelle on ne rigole pas : les ingrédients de la χωριάτικη, la salade grecque ou litteralement la salade du village (χωριό en grec).

  • Tomates
  • Concombre
  • Oignon
  • Poivron
  • Origan
  • Feta
  • Olives noires
  • Huile d’olive

Quand la feta a du goût, les tomates sont bien mûres et l’huile d’olive abondante, c’est un vrai délice. Et quand on la mange à l’ombre de notre accacia dans notre χωριό, Adravasti, c’est presque le paradis.