Jarre sur la vie de ta mère !

Impossible d’entrer dans une vielle maison crétoise sans les admirer. Majestueuses, elles évoquent des temps anciens, quelques fois chaulées, elles peuvent servir de pot pour une plante ou rester fidèles à leur première mission, le stockage de denrées.

Ces grandes jarres s’appellent des pitharia (πυθαρια). Et je les aime car elles forment un fil rouge dans la culture grecque depuis des millénaires. Jamais, depuis les Minoéens, la Crète n’a cessé d’en produire et jamais les Crétois.e.s n’ont cessé de les utiliser. Bien sûr, les frigos et autres tupperwares les font passer pour des ringardes de la conservation. Il n’empêche, leur production est encore bien en vie et elles sont loin d’avoir dit leur dernier mot !

La culture de l’olivier est millénaire. Ce n’est pas seulement un argument marketing bien éculé lu au dos d’une bouteille d’huile d’olive de mauvaise qualité : c’est la clé pour comprendre en quoi les jarres ont joué un rôle central dans le développement de l’oléiculture. Car à quoi bon cueillir puis presser les olives si l’on ne peut ni conserver, ni transporter leur huile ? 

Alors nos ancêtres du monde Méditerranéen se mettent à la recherche d’un solution…

Et tout aussi étonnant que cela puisse paraître, la jarre n’est pas toujours l’option privilégiée. Étonnant oui, pour nous autres modernes qui avons arpenté les musées archéologiques de Grèce et du monde entier en constatant que la moitié des collections étaient constituées de céramiques. 

Pitharia entreposées devant une maison en travaux dans le village d’Adravasti. 

Cette extraordinaire capacité de conservation de la céramique a été immensément utile aux archéologues pour reconstituer la vie antique. Mais… cette même extraordinaire capacité de conservation a agit comme un miroir déformant. Je m’explique* ! Si la jarre a longtemps été considérée comme le principal moyen de conservation de l’huile d’olive, c’est simplement que sa grande concurrente, elle, ne s’est pas conservée et a été oubliée dans les fouilles de l’histoire.

Cette concurrente, c’est l’outre, fabriquée à partir de peaux de chèvres ou d’autres animaux. Légère, réutilisable, l’outre est longtemps la chouchoute des vendeurs antiques d’huile d’olive. Elles sont tellement courantes qu’une « chèvre d’huile », c’est à dire une outre en peau de chèvre contenant de l’huile devient même une unité de mesure usuelle que l’on retrouve dans de nombreux textes ! 

Idéales ces outres, sauf que… en Grèce notamment, le plus gros animal à disposition est la chèvre, qui ne permet pas de contenir plus de 40 à 50 litres. Pour la conservation et le transport de grandes quantités, il faut donc trouver d’autres solutions.

Jarres qui attendent d’être embarquées par bateau sur l’île de Skyros, milieu du XXème siècle. 

C’est ici que la céramique entre en jeu. Solides, étanches, capables de contenir des centaines de litres, les jarres ne manquent pas d’atouts.

Stockées au fond des bateaux, elles sont même un élément clé de la prospérité de la Grèce antique. Rappelez vous que l’huile d’olive est, avec le vin, l’un des tout premier produit que les Phocéens, ces Grecs d’Asie mineure, apportent en Gaule par Marseille au VIème siècle avant JC. Quant au stockage de l’huile, les anciens n’avaient rien à envier à nos grandes cuves modernes puisque l’on a retrouvé à Chypre des grandes jarres datant du XIIIème siècle avant JC capables de contenir 50 000 litres !

Quelques pitharia et l’église de Thrapsano prises en photo par Pierre C. que je remercie. Merci aussi au passage à Jean-Pierre B. qui a inspiré cette lettre !

Partout où il y a de de l’argile, les artisans potiers s’installent, comme à Thrapsano, au centre de la Crète. Jusqu’à aujourd’hui, ce petit village est l’épicentre de la production crétoise de pitharia. Il faut dire, grâce à la présence naturelle d’argile et de bois en quantité pour alimenter les fours, sa localisation est idéale. La légende dit même que les potiers de Thrapsano seraient des descendants directs de premiers potiers minoens… du IIIème millénaire avant JC.  Ça ne coûte rien d’y croire, et je ne suis pas du genre à laisser passer une belle histoire.

Pendant des siècles, la vie des potiers de Thrapsano est organisée en fonction des saisons : pendant l’été, ils produisent sur place leurs grandes pitharia puis, quand vient l’automne, ils partent les vendre à dos d’âne. Mais ce transport chahuté fait la terreur des potiers qui risquent de tout perdre à chaque mauvais virage. C’est pourquoi un proverbe local affirme « Tout le monde craint Dieu, et les Thrapsaniotes craignent les murs ».

Encore aujourd’hui, le commerce des pitharia fait la fortune de la ville. Au mois de juillet s’y organise un festival de la poterie et si vous n’avez pas la capacité de repartir avec une jarre volumineuse, vous pouvez visiter le joli musée de la céramique. 

* Ou plutôt je laisse Jean-Pierre Brun, professeur au collège de France et archéologue spécialisé dans les techniques et économies de la Méditerranée antique, vous expliquer. 

Et si vous êtes à Marseille et que cet article vous donne envie de mettre les mains dans la terre, venez me voir à l’atelier Déméterre !

Non c’est non !

Χρόνια πολλά!  Le 28 octobre dernier, la Grèce a célébré l’une de ses deux fêtes nationales : le jour du non ! (το όχι). 

Petit retour en arrière : Nous sommes en octobre 1940, toute l’Europe centrale est entrée en guerre. La Grèce est une dictature et à sa tête se trouve le militaire Ioánnis Metaxás. À quelques kilomètres de là, l’Italie fasciste jalouse son allié allemand et veut prouver qu’elle peut, elle aussi, connaître des victoires militaires. La jeune nation grecque semble être la victime idéale pour assouvir les ambitions militaires de Mussolini. Alors le soir du 28 octobre, après une petite sauterie à l’ambassade allemande en Grèce (ça ne s’invente pas), l’ambassadeur italien annonce l’ultimatum : soit la Grèce laisse l’Italie occuper le territoire grec, soit elle lui déclare la guerre. La réponse ? NON ! (Όχι, pour ceux du fond de la classe). Pourtant, Metaxás entretient d’excellentes relations avec l’Allemagne nazie. Sa proximité idéologique avec Hitler lui a même permis de signer des accords commerciaux l’année précédente… 

Ioannis Metaxás (deuxième en partant de la gauche), en douteuse compagnie. 

Mais Mussolini, sans en avertir Hitler, a dans l’idée de reconstruire l’Empire Romain, dont la Grèce ferait, bien sûr, partie. Ça tombe mal, Metaxas se prépare depuis 1936 à un conflit armé le long de sa frontière Nord, initialement pour se protéger d’une éventuelle attaque de la Bulgarie. Malgré leur infériorité numérique (16 divisions grecques contre 27 divisions italiennes) et matérielle, les Grecs montrent une détermination et un courage sans faille qui fera l’admiration de Churchill lui même qui aurait déclaré “Hence, we will not say that Greeks fight like heros but that heros fight like Greeks” (Désormais, nous ne dirons pas que les Grecs combattent comme des héros mais que les héros combattent comme des Grecs). En quelques mois, ils parviennent à faire reculer les troupes italiennes jusqu’en Albalnie. En avril, Mussolini doit demander l’aide d’Hitler qui envoie ses troupes et écrase la rébellion grecque. 

Tout ça pour ça ? Bien au contraire ! Tout d’abord la victoire grecque contre l’Italie a été la toute première des Alliés, suscitant un espoir nouveau chez tous les peuples s’opposant au nazisme. De plus, c’est le début de la fin pour Mussolini qui sort du conflit humilié. Les historiens considèrent aussi que cet acte de bravoure a eu une influence certaine sur la décision des Américains d’entrer en guerre. Enfin, en obligeant l’Allemagne à venir prêter main forte à son allié, la Grèce a retardé l’invasion allemande de l’Union Soviétique, l’opération Barbarossa, celle-ci se déroulant alors dans des conditions climatiques bien moins favorable. Bref, une belle leçon qui prouve qu’un Non vaut mieux que deux tu l’auras. 

Depuis, chaque 28 octobre a lieu un défilé militaire ainsi qu’un défilé des écoliers et étudiants. Traditionnellement, c’est le ou la premier.e de la classe qui porte le drapeau, en tête de cortège. Cette implication des enfants, dans un pays qui porte encore les séquelles de tant d’années de dictature, suscite beaucoup de critiques. Elles sont assez bien résumées sur ce dessin (dont je n’ai pu retrouvé l’auteur.e…) : 

La traduction :
“Et n’oubliez pas qu’aujourd’hui nous célébrons la liberté !! Celui qui ne participe pas à la parade sera éliminé.”

La terre tremble sous nos oliviers

Mardi 12 octobre dernier, un puissant séisme de magnitude 6,3 à frappé l’Est de la Crète. Son épicentre se trouve à seulement 24 kilomètres de notre village d’Adravasti et ses secousses se sont fait ressentir fortement, au point de détruire la petite chapelle de Xerokampos. Cette chapelle, je la connais bien car je passe devant quand je vais récolter du sel dans les rochers, au sud de la plage de l’argile. Souvent, je m’y arrête. À l’intérieur, on trouvait un tableau représentant Saint George terrassant son dragon. On pouvait aussi y déposer un tamata, cet ex-voto grec dont je vous parlais l’année dernière. Dans l’article que je leur ai consacré, il y a une photo prise dans la jolie chapelle détruite. On y voit des tamatas représentant un militaire, un cheval ou encore un monsieur qui a l’air d’avoir envie de faire pipi. J’espère que chacun de ces voeux a été exaucé. Le mien ? La revoir renaître de ses cendres !

Quittons le spirituel et revenons à la science. Il se trouve que vous avez à faire à une grande spécialiste puisque j’ai eu l’honneur d’assister en personne au cours sur la tectonique des plaques de Mme Davy, professeur de SVT des 4èmeB au 3ème étage du bâtiment A du collège Victor Hugo. En gros, la terre est constituée de grandes plaques de la taille de continents et qui portent d’ailleurs le nom de continents, ces plaques elles bougent, tout le temps. Depuis environ 30 millions d’années, la plaque africaine se déplace vers le Nord-Est, en direction de la plaque eurasienne à un rythme d’un centimètre par an. Aux points de contact, aussi appelé marge active, la plaque africaine s’enfonce sous la place eurasienne, c’est ce qu’on appelle le phénomène de subduction. Cette marge, représentée en rouge sur la petite carte ci-dessous, passe par la Crète et encercle la mer Égée d’un arc gracieux. Cela explique le relief montagneux de tout cette partie de la Grèce ainsi que les séismes fréquents.

Ce séisme succède à celui qui avait fait un mort et des dizaines de blessés dans la région d’Heraklion le 27 septembre dernier. Oui, la terre tremble souvent en Crète mais de telles secousses avec autant de dégâts sont rares.

L’histoire antique en a gardé la trace: il semble que la Crète ait été le bassin du plus grand séisme jamais connu en Méditerranée, à l’aube du 21 juillet 365. Un tremblement de terre si puissant qu’il a causé un retrait spectaculaire de la mer avant qu’une vague immense ne vienne frapper la côte. Des bateaux sont retrouvés à plusieurs kilomètres à l’intérieur des terres. Et si son épicentre se trouve au Sud de la Crète, de nombreuses régions de Méditerranée sont touchées, dont Alexandrie, qui voit son phare vaciller. Cette épisode tragique est raconté par l’historien latin Ammien Marcellin (Ammianus Marcellinus en VO) dans son Histoire romaine. Nombreux d’ailleurs sont les auteurs qui y font référence. Mais Marcellin est le seul ne donner aucune explication divine, ce qui fait de lui la source préférée de nos historiens modernes. Car pour la plupart des chroniqueurs de l’époque, la chose est entendue : le tremblement de terre et le tsunami qui a suivi sont la conséquence directe de la mort de l’empereur Julien.

Avant de comprendre d’où leur vient cette idée saugrenue, il faut s’arrêter un instant sur le parcours du fameux Julien.

L’empereur Julien par Giovanni Battista Cavalieri, 1583. 

Neveu de Constantin le Grand, premier empereur chrétien, pour lui, tout avait très mal commencé. Il a six ans à la mort de son oncle quand son cousin Constance II décide l’exécution de toute la famille proche de Julien afin d’éviter que cette branche de la famille ne revendique le trône. Il est envoyé en exil à Constantinople où il est baptisé de force et élevé par un évêque. Après avoir étudié la philosophie à Milan et à Athènes, il est finalement convoqué par son cousin-empereur qui lui décerne le titre de César des Gaules. Voilà ce rat de bibliothèque, nerveux et timide à la tête de l’armée impériale. Et contrairement à toute attente, il excelle dans ce nouveau rôle ! Il faut dire que cet admirateur d’Athéna, déesse de la guerre, prend la tâche très au sérieux : il refuse tout le faste impérial, apprend à marcher au pas et partage avec ses soldats nourriture et conditions de vie. Les victoires s’enchainent en Gaule et en Germanie, à tel point que l’empereur décide de l’envoyer à la frontière perse pour se débarrasser de ce numéro deux un peu envahissant. Comprenant la manoeuvre, l’armée de Julien refuse et proclame leur chef Auguste à la place de l’Auguste. Face à ce putsch, Constance II prend la route vers la Germanie accompagné de son armée pour venir remettre à sa place son cousin ambitieux. Hélas pour lui, il tombe gravement malade en chemin et, sur son lit de mort, finit par désigner Julien comme son successeur.

À peine aux commandes, le nouvel empereur promulgue un un édit de tolérance qui autorise toutes les religions. Helléniste convaincu, il souhaite en effet refermer la parenthèse chrétienne et entreprend de restaurer les rites polythéistes. Je ne divulgache* rien en vous annonçant que c’est un échec : alors qu’on ne compte que 5 à 10% de chrétiens dans l’Empire au moment de la conversion de Constantin Ier en 312, à la fin du siècle la foi chrétienne était devenue un signe de prestige social et un élément indispensable pour faire carrière dans l’Empire. Et sa chute en 476 n’est que le point de départ d’une expansion très forte du christianisme en Europe et dans le monde. D’ailleurs, quand Julien meurt au combat en 363, trois ans après son accession au pouvoir, la légende veut qu’il ait déclaré « Tu as vaincu, Galiléen ! », Galiléen signifiant ici Jésus Christ.

Le tremblement de terre, deux ans plus tard, serait donc aux yeux de plusieurs auteurs un deuil porté par les Dieux, Poseidon en tête, pour celui qui a tenté de leur redonner leur place.

Si le sujet vous intéresse, je vous recommande la lecture de l’article Poséidon, le dieu du séisme, paru en novembre 2016 dans la Revue des Deux Mondes.

Photo prise à côté d’Adravasti le 12 octobre dernier.


* Valide au scrabble

Un gars, une fille

(et toute une nation qui n’y croyait plus)

Cette édition 2021 de Roland Garros est à marquer d’une pierre blanche (et bleue). Non seulement Stéfanos Tsitsipás a atteint la finale mais sa compatriote Maria Sakkari est, quant à elle, arrivée en demi-finale du tournoi*. Une première des deux côtés.  

« Un moment fantastique pour le tennis grec » dira-t-elle en conférence de presse. C’est peu dire ! Car précédemment, la Grèce s’était plutôt illustrée par son absence dans les tournois du Grand Chelem. 

Oui, il y a bien eu Pete Sampras, ce « grec d’Amérique » et le colérique Marcos Baghdatis né à Chypre d’une mère grecque… Mais on doit l’avouer, les résultats n’étaient pas glorieux pour une nation qui s’est tant de fois illustrée dans les sports d’équipe. 

Pourtant, tout avait bien commencé. À l’occasion des premiers Jeux Olympiques de 1896, est construit à Athènes l’un des tous premiers clubs de tennis au monde, L’Athens Lawn Tennis Club. Mais rapidement, les espoirs d’en faire un centre de formation pour jeunes sportifs laissent la place à un lieu de rassemblement pour riches expatriés. Un petit sursaut s’observe dans les années 1980 avec la création du tournoi ATP d’Athènes sur terre battue, en 1986. Mais dès 1990, les organisateurs renoncent au tournoi féminin… avant de renoncer tout court en 1994. Depuis, c’est la dégringolade. Une fédération corrompue, discréditée, portée un président magouilleur et une totale incapacité à faire émerger des talents. 

Jusqu’à l’arrivée de nos deux cracks.

Comment explique-t-on leur ascension ? Il semble malheureusement que la réponse se trouve plus du côté de leur parcours individuels que celui d’une politique nationale efficace. D’un côté Tsitsipas est le fils d’une joueuse de tennis pro d’origine russe, qui a converti son Grec de mari au sport avant d’emmener, à deux, le petit Stefanos sur les cours dès l’âge de trois ans. De l’autre, Maria est la fille d’Angelikí Kanellopoúlou, ancienne pro et 43ème au classement WTA en 1987, à la grande époque de la création du tournoi d’Athènes justement. Elle-même étant la fille de Dimítrios Kanellopoúlos, joueur de tennis professionnel au parcours moins flamboyant. Peu dire que ces deux là sont dotés d’un patrimoine sportif qui jouait sacrément en leur faveur. 

Mais qu’importe ! La Grèce capitalise désormais sur leurs stars qui ouvrent la voie à toute une génération, à commencer par Pétros, le petit frère de Stéfanos de 20 ans, actuellement numéro 920 mondial. Rendez-vous pour les JO de Tokyo ou nous retrouverons Maria et Stefanos, en double mixte, s’il vous plait !

Le jour le plus long

Après un an de cache-cache avec le covid, me voilà rattrapée, obligée de me quarantiner dix jours en ce début de mois. Peu de symptômes hormis cette impression étrange d’être enfermée dans un jour sans fin, sans même l’échappatoire de faire quelques courses ou de descendre les poubelles. Comme je déteste gâcher, la nourriture comme les heures, j’ai décidé de supprimer ces dix jours de ma vie et de reprendre mon existence au 10 avril là où je l’avais laissée le 1er, en commençant par faire quelques poissons d’avril autour de moi. 

Cela m’amène à une autre incongruité temporelle, fort d’actualité d’ailleurs : celle concernant la date de Pâques. Si les catholiques l’ont célébré le 4 avril dernier, les orthodoxes devront, eux, attendre le 2 mai prochain. Situé parfaitement entre ces deux Pâques, ce dimanche 18 avril semble le moment idéal pour discuter de la question !

Avant de commencer, laissez moi tester vos connaissances en failles temporelles d’hier et d’aujourd’hui : 

1. Pourquoi le Nouvel An a-t-il lieu le 1er janvier et pas le 25 décembre ? 

A. Il s’agit de la date de la circoncision de Jésus, huit jours après sa naissance. 
B. Jules César, en 46 avant JC, décide de commencer l’année le 1er janvier. Le mois de Janus est idéal puisque c’est celui du dieu aux deux visages : l’un est tourné vers le passé, l’autre vers le futur. 
C. La semaine qui sépare Noël du Nouvel An fut sacrée « semaine de l’oubli » par Jésus trop occupé d’engloutir des Ferrero Rocher devant un video-gag spécial fêtes de fin d’année. 

2. Pourquoi passe-t-on à l’heure d’hiver le dernier dimanche d’octobre ? 


A. Cela permettrait de faire des économies d’énergie (mais ce n’est toujours pas certain).
B. Parce que passer la journée dans le noir complet au mois de novembre, cela développe notre empathie pour les inuits et autres peuples du grand Nord. 
C. Il s’agit d’un canular proposé par Benjamin Franklin en avril 1784 pris au premier degré 

3. Brad Pitt, né le 18 décembre 1963 est plus vieux que Jean Castex, né le 25 juin 1965. Une explication ?



A. Brad a réussi à gagner de nombreux jours sur la vie en faisant des tours du monde en sens inverse dans son jet privé. Malin !
B. André, agent administratif de la préfecture de Vaucluse en charge de refaire le passeport de Monsieur Jean CASTEX, a fait une faute de frappe et a inscrit ‘1965’ au lieu de ‘1945’ sur le document d’identité flambant neuf de Jean.
C. La génétique est injuste, il faut l’accepter 

4. Pourquoi les orthodoxes fêtent Pâques après les catholiques ? 

A. En Russie, il fait froid, et le chocolat, c’est moins bon quand c’est gelé. 
B. Parce que les Églises d’Orient préfèrent ne pas être d’accord avec le soleil plutôt que de l’être avec la cour de Rome. 
 C. Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ? Jésus et ses successeurs avaient la pensée complexe, voyez-vous.

Réponses :  1.B 2.A et B 3.C 4.B

Pour l’explication détaillée de la question 4, accrochez-vous !

Pâques commémore la résurrection du Christ. Jusqu’ici je ne vous apprends rien. Elle a lieu quelques jours après la Pâque juive, Pessa’h que Jésus célébrait avec douze de ses amis lors de la fameuse Cène un jeudi soir. La suite, vous la connaissez : le vendredi, Jésus est crucifié, le dimanche, il ressuscite. La date de Pâques est donc liée à celle de la Pâque (sans s), juive célébrant, elle, la sortie d’Égypte du peuple hébreu. Le calendrier hébraïque étant un calendrier lunaire, Pessa’h est toujours célébrée le 15 du mois de Nissan (qui tombe généralement entre nos mois d’avril et de mai), c’est à dire le jour de la première pleine lune de l’équinoxe du printemps. 

C’est à ce moment-là que tout se complique ! 

Statut de l’empereur Constantin à York en Angleterre par le sculpteur écossais Philip Jackson

En 325, l’empereur romain Constantin décide de préciser la date de Pâques et la fixe au « dimanche qui suit le quatorzième jour de la lune qui atteint cet âge au 21 mars ou immédiatement après ». Avec cette affirmation, Constantin fait donc tomber l’équinoxe du printemps invariablement au 21 mars. Or, le calendrier de l’époque, le calendrier Julien, ordonné par Jules César comme son nom l’indique, comprend une erreur. Notre bon Jules avait calculé que la terre mettait 365,25 jours pour faire un tour complet autour du soleil alors qu’elle ne met que 365,2422*. Soit un décalage de 3 jours tous les 400 ans entre la réalité astronomique et le calendrier. À ce rythme là, comme le dit Bernard dans les Bronzés font du ski : « l’année prochaine, on skie au mois de juillet ». 

Portrait du pape Grégoire XIII par Lavinia Fontana

Pour remédier à ce décalage qui avait trop duré, le pape Grégoire XIII en 1582, propose pendant le concile de Trente une réforme du calendrier : il supprime certaines années bissextiles et pour rattraper tout le retard accumulé, le 4 octobre 1582 est suivi du… 15 octobre, dix jours qui n’ont jamais existé. La France, l’Espagne et l’Italie ainsi que la plupart des pays de la chrétienté suivent la décision du pape mais les pays protestants et orthodoxes européens ne comptent pas se plier à une décision de Rome, aussi valide soit-elle d’un point de vue mathématique. C’est pour cette raison que l’on dit que les « Églises d’Orient préfèrent ne pas être d’accord avec le soleil plutôt que de l’être avec la cour de Rome ». Si la plupart des pays ont petit à petit adopté ce nouveau calendrier, l’Église orthodoxe, elle, s’y est toujours refusée ! Cette rébellion explique pourquoi les dates de Pâques chez les catholiques et chez les orthodoxes diffèrent. 

* Rendons à César ce qui est à César : cette erreur de calcul ne doit pas occulter son génie. C’est lui qui, le premier, comprend qu’il est plus judicieux d’indexer le calendrier sur le soleil plutôt que sur la lune. Il décide donc d’abandonner le calendrier lunaire romain en 46 avant JC au profit du calendrier Julien. Pour se réaligner, l’année 46 avant JC dura donc… 445 jours au lieu de 365 et fut appelée, à juste titre il me semble, l’année de la confusion. 

Orthodoxie sanitaire

Noël confiné, une situation qui en rappelle une autre.

Le 19 avril dernier, les Grec.que.s devaient renoncer à fêter Pâques, la plus importante fête de l’année, en famille à cause d’un virus qui n’avait alors fait que 113 morts sur leur territoire national. Pour prévenir toute tentative de rassemblement, le gouvernement de Kyriakos Mitsotakis impose une interdiction totale de voyager dans le pays du Samedi Saint jusqu’au lundi de Pâques. Et pour qu’il n’y ait aucune ambiguïté sur l’interprétation du terme « interdiction totale », l’amende de violation du confinement passe de 150€ à 300€ pendant ces trois jours, les bateaux vers les îles sont bloqués et les hélicoptères sont déployés au dessus d’Athènes et Thessalonique. Il faut dire, l’enjeu est de taille : deux millions de personnes circulent habituellement à travers le pays à l’approche de Pâques. Dans un pays dont le système de santé a été anéanti par dix ans d’austérité, la pandémie est un luxe que la Grèce ne peut pas s’offrir. 

Agneau pascal en solitaire sur une terrasse athénienne le 19 avril dernier.

À cette époque, de nombreuses voix au sein de l’Église orthodoxe s’élèvent pour critiquer la politique du gouvernement. Dans les villages, les popes organisent la résistance. Rejet des masques, fidèles qui embrassent les icônes, pour les gestes barrières il faudra repasser. L’évêque Chrysostomos de Patras, assure que « ceux qui croient à la sainte communion savent qu’ils n’ont rien à craindre » et on entend même des membres du clergé affirmer que le vin distribué pendant la communion élimine le virus. En mai, les Églises ré-ouvrent leurs portes et les images de communion, comme ci-dessous, alimentent de nouveau la polémique. 

Loin d’être anecdotique, la position de l’Église orthodoxe est, littéralement, une affaire d’État. La séparation entre l’Église et l’État telle que nous la connaissons en France n’existe pas en Grèce. Comment un gouvernement peut-il accepter une telle opposition quand les salaires des ecclésiastiques sont payés par les fonds publics ?

Gants, masque et communion. La trinité des gestes barrières à la réouverture des églises en mai dernier. 

Pourtant, l’arrivée au pouvoir du parti conservateur Nouvelle Démocratie en juillet 2019 aurait pu constituer une aubaine pour le clergé Grec. Le Premier Ministre précédent, Alexis Tsipras, était le premier chef d’État athée et de nombreuses mesures telles que l’abandon du statut de fonctionnaire pour les membres de l’Église avaient été mises en place sous sa gouvernance. À moins que ce soit précisément son statut de chef de fil des conservateurs qui autorise Kyriakos Mitsotakis à une attitude très ferme vis à vis de l’Église orthodoxe. Élu depuis moins d’un an quand l’épidémie s’attaque à l’Europe, il prend le sujet extrêmement au sérieux dès les premiers signaux d’alerte en Italie : Fermeture des frontières, villages mis en quarantaine, fermeture des écoles… Sa gestion rapide fait de la Grèce au printemps 2020 la championne d’Europe de la lutte contre le virus. Et son gouvernement ne recule devant aucune pression religieuse, semblant même vouloir faire de Pâques un exemple de son intransigeance face à l’épidémie. 

Le Premier Ministre Grec, Kyriakos Mitsotakis, poivre et sel du masque aux cheveux. 

Mais alors que la deuxième vague s’attaque à la Grèce, fragilisée par l’ouverture de ses frontières durant l’été afin de sauvegarder une partie de sa saison touristique, l’Eglise se trouve dans l’obligation de totalement changer de discours. Car plus que les fidèles, ce sont les hommes d’Église qui sont les premières victimes de l’épidémie : pas moins de 5 prélats sont contaminés début décembre, dont l’archevêque Iéronymos. Le même qui avait affirmé au printemps que « sans la communion, il n’y a pas d’église ». 

Dans un pays où 90% de la population se déclare chrétienne, les églises sont actuellement limitées à neuf personnes et vingt-cinq dans les cathédrales, contre trente chez nous. Une mesure qui, malgré l’approche de Noël, ne rencontre pas de ferme contradiction de l’Église. Une façon de nous rappeler que, quand ils s’agit des mesures sanitaires, ils sont plus orthodoxes que nous. 

Ce soir on vous met le feu

Connaissez-vous le raki, aussi appelé Tsipouro dans le Péloponnèse ? Si cet alcool de raisin que l’on distille dans l’alambic du village tous les ans au mois d’octobre n’est pas d’une grande finesse organoleptique, il est néanmoins une composante essentielle de la culture crétoise. 

Trois semaines après la fin des vendanges et quelques semaines avant le début de la récolte des oliviers, un creux de calendrier donne aux Crétois.e.s l’occasion de décompresser un peu. C’est le temps du Kazani, la tradition la plus alcoolisée de tous les temps. Pour vous donner un ordre d’idée, je dirais que la fête de la bière à Munich est au Kazani ce que ce que Disneyland est au Hellfest. Un soir d’octobre, on rassemble tout le village et on commence la distillation. Pour cela, il faudra du raisin que l’on a laissé fermenter trois semaines et… des grignons d’olive.

Oui mais les grignons d’olive, c’est quoi au juste ?

Les grignons sont les déchets produits par l’extraction de l’huile d’olive. Une fois que nos jolies olives ont été écrasées, malaxées et pressées dans un extracteur à froid, il reste une pâte encore huileuse composée de restes de noyaux et de fibres d’olive. Cette pâte est envoyée dans une usine d’huile lampante, l’huile raffinée utilisée pour la combustion ou pour les voitures. Elle passe alors à nouveau dans un extracteur dont la température monte, cette fois, à plus de cent degrés. Ce qu’il reste quand toute l’huile, ou presque, a été extraite s’appelle les grignons d’olive. Et comme tout se transforme et rien ne se perd dans l’olivier, ils sont utilisés comme combustibles

Vous l’avez compris, ce sont ces grignons qui viennent alimenter le feu de notre kazani. Les voici sur la photo de gauche ci-dessous et leur aboutissement quelques minutes plus tard sur celle de droite :

Pour survivre à cette soirée, il suffit de suivre une règle : ne jamais boire le raki chaud tout juste distillé. Bien entendu, ni moi ni aucune personne de ma famille ne sommes tombé.e.s dans ce piège. La photo ci-dessous a été prise UNIQUEMENT dans un intérêt de documentation.

Confiné.e.s dans l’huile – Épisode 7 (Partie 1)

Quand il s’agit de leur héritage culturel, musical ou culinaire, les Crétois sont très conservateurs.

Pour vous faire une idée, pensez à la personne la plus conservatrice que vous connaissez. Vous l’avez ? Non, je ne vous parle pas de cet oncle chauvin qui dit “on fait quand même de bonnes choses en France” en dégustant un St Joseph. Je vous parle plutôt de celui qui a refusé de goûter ce whisky Talisker de 16 ans d’âge parce qu’il préfère le calva maison du voisin. 

Le problème avec le conservatisme, c’est que ce whisky écossais, il était vraiment très bon. L’avantage, c’est qu’il permet aux traditions de perdurer, de se transmettre et de réunir les générations. 

Aujourd’hui, en l’honneur de tous les mariages reportés, oui même ceux auxquels vous étiez ravis d’échapper, on enfile nos habits de lumière et on file à la plus traditionnelle des traditions : le mariage grec ! 

Et comme il y avait fort à dire sur le sujet, ce n’est que le premier acte d’une saga en deux partie. 

Quatre mariages et deux mille invités 

Dans un pays où plus de 90% de la population se reconnaissent comme orthodoxes (et seulement 4% athées), le mariage religieux est de rigueur pour tous les couples qui auraient l’espoir de dîner ensemble au restaurant sans provoquer un mini-scandale. 

Il y a chez la jeunesse grecque une grande fierté vis-à-vis de leurs traditions et elle semble bien déterminée à maintenir ses rituels.

Il y a chez la jeunesse grecque une grande fierté vis-à-vis de leurs traditions et elle semble bien déterminée à maintenir ses rituels.

C’est particulièrement marquant lors de la cérémonie religieuse, avec, par exemple, le rite des Stefana (στέφανα), ces couronnes tressées placées tour à tour sur la tête du marié et de la mariée. C’est souvent l’occasion pour le ou la pauvre témoin responsable de ce passe-passe d’emmêler les rubans et de marcher sur la traine. La cérémonie se poursuit malgré tout et après avoir partagé une coupe de vin, les mariés font trois fois le tour de l’autel et embrassent la croix tenue par le pope*. Pendant son discours, en particulier durant le passage sur les obligations de la mariée envers son époux, les femmes modernes ont le bon goût d’écraser le pied de leur fiancé. Pour qu’il ne se fasse pas trop d’illusions en quelques sortes. 

Après la cérémonie, on rejoint le lieu de la fête et si vous avez déjà croisé un.e Grec.que dans votre vie, vous savez qu’ils s’y connaissent en générosité. Alors on oublie la liste de mariage et on invite tout simplement le village en entier. 500 personnes ? Même pas peur. 

Les grandes tables sont installées et le Meltemi, le vent du Nord qui souffle l’été, vient s’engouffrer sous les nappes en papier. Pas de plan de table, pas de buffet. Les assiettes de mezze sont déjà servies et chacun peut déguster une tiropita, un peu de xigalo, le fromage de chèvre et brebis local ou un dolmades. Puis arrive un plat de spaghetti (trop cuites) sauce tomate à la viande façon bolognaise avant l’agneau (ou le porc) au four, toujours accompagné de frites. C’est souvent froid mais on est pas venu pour ça. 

Opa!

Danseurs et danseuses à un mariage au centre de la Crète en Juillet 2019 photographié.e.s par Georges Tatakis.

Mieux que Claude François pour réunir les générations, la seule musique acceptée est le rebetiko (ρεμπέτικο), ce style de musique grec dont j’aimerai beaucoup vous parler une prochaine fois. En ce qui concerne la danse, vous avez sûrement entendu parlé du Sirtaki, celle que l’on aperçoit dans le mythique Zorba Le grec par exemple ? De façon similaire, en Crète, on danse en ligne en se tenant par le bras. Et à chaque région de Grèce, sa déclinaison. En Crète, nous avons le Siganos (σιγανος) ou le rapide Maleviziotis (μαλεβυζιώτης).

Quelques fois, le mariage se transforme en véritable performance de danse comme lors de celui-ci. À d’autres, plus sérieux, des danseurs professionnels viennent ouvrir le bal comme lors de celui-ci ou celui-là.

Vous voulez profiter du confinement pour apprendre quelques pas ? Voici un tuto ! 

 * je vous parle d’un temps que les pré-covid19 ne peuvent pas comprendre. 

Le mariage de Thétis et Pelée

Pire encore que le mariage de mon meilleur ami*, je vous présente le mariage de Thétis et Pelée.

Pelée retenant Thétis par la taille. Un petit lion semble surgir derrière sa tête pour venir mordre le bras de Pelée, faisant allusion aux transformations de Thétis. 

Alors que Zeus lui-même convoite la belle néréide Thétis, la sage Thémis fait la prédiction suivante  : Déesse de l’onde, il faut que tu deviennes mère ; de toi naîtra un fils dont les exploits surpasseront ceux de son père et qu’on proclamera plus grand encore.” Inquiet, Zeus préfère alors la marier à Pelée. On est jamais trop prudent.

Fâchée de devoir épouser un simple mortel, Thétis s’échappe. Avec l’aide du centaure Chiron, Pelée se met à sa poursuite et la retrouve dans une grotte de Magnésie. Ultime tentative de fuir ce mari encombrant, elle se transforme alors tour à tour en lion, serpent, feu, seiche, arbre et eau. Mais ce dernier l’attache avec des chaines et l’enserre si fort de ses bras qu’elle reprend sa forme humaine. “Ce ne peut être, dit-elle, que par la volonté des Dieux que tu triomphes.”** : Le mariage peut enfin avoir lieu. 

Tous les Dieux sont invités à l’union sur le mont Pélion. Tous ? Non ! Eris, la Discorde, dont on redoute la présence n’est pas conviée. Pour se venger, celle-ci apparait tout à coup et jette sur le banquet une pomme d’or qui porte l’inscription “A la plus belle!”. C’est cette pomme qui, indirectement, sera la cause de la guerre de Troie. Et pour boucler la boucle, devinez qui nait de l’union de Thétis et Pelée ? Je vous le donne en mille : Achille !

Mariage de Thétis et Pélée par Rubens

 * Classique de 1997 avec Julia Roberts
 ** Ovide, 
Les Métamorphoses. Qui a dit que ces astérisques ne servaient qu’à faire des blagues ?

Confiné.e.s dans l’huile – Épisode 2

Au sommaire en ce dimanche qui n’a pas du tout l’air d’un dimanche : 

  • Je vous dis tout sur les tamatas, ces jolis ex-voto grecs
  • Une suggestion pour une activité créative en famille : et si vous faisiez vos propres tamatas chez vous ?
  • Sainte Paraskeve ça ne vous dit rien ? C’est le moment pour en savoir plus sur la moins racunière des Saintes

Hakuna Tamata

Depuis l’Antiquité, en Grèce peut être plus qu’ailleurs, les hommes et les femmes n’ont jamais cessé de faire des offrandes à(aux) Dieu(x) pour s’assurer ses(leurs) bonnes faveurs.

Dans les chapelles orthodoxes, vous trouverez des murs entiers recouverts de petits rectangles en métal découpé représentant une personne aimée, des yeux, un bateau ou encore un militaire en uniforme. Ils implorent la renaissance d’un amour perdu, la guérison miraculeuse d’un organe ou le bon retour d’un marin.

Alors que dans la tradition catholique, les demandes intéressées sont symbolisées par un cierge allumé ou une pièce déposée, cette tradition prend en Grèce une forme beaucoup plus visuelle :

Le τάμα (de τάζω, promettre) est ce morceau de métal adressé à Dieu, à un Saint ou une Sainte. Ces petits contrats avec une divinité qui décorent les chapelles cachent mille et une histoires singulières.  Simple précaution, une façon de dire « on ne sait jamais » ou dernier espoir, comme pour se résoudre « si dieu ne peut rien y faire, c’est que c’est bien foutu ». 

J’aime beaucoup m’arrêter sur ces ex-voto naïfs dans les chapelles crétoises et en ces temps troublés, il me reviennent en tête.

Alors on s’y met nous aussi ! En plus, ça nous donne l’occasion d’en faire une super activité créative en famille. 

Tamata de la minuscule chapelle de Xerocampos en Crète, 2016

À vos voeux, prêts, partez

Pas besoin de métal : On prend une feuille de papier, des feutres et du ruban si on en a sous la main et c’est parti !

Proposez à vos enfants de dessiner ceux ou celles qu’ils ou elles veulent protéger, les personnes qui leur manquent ou toutes ces jolies choses que l’on rêve de refaire. En ces temps de confinement, on peut imaginer des tamatas évoquants la mer, des paysages sauvages, le parc d’en bas, un anniversaire plein d’enfants ou un ballon de foot. 

Voici ce que ça donne chez nous. Réalisation d’Achille, 4 ans, très porté sur le football !

Elle vous a à l’oeil

À l’instar de Saint Antoine de Padoue chez les catholiques, Sainte Parascève (en grec Αγία Παρασκευή, littéralement Sainte Vendredi) est certainement la plus sollicitée des Saints et Saintes ! Guérisseuse des aveugles, c’est peu de dire qu’elle doit posséder une une bonne collection de tamata chez elle*.

Parascève naît dans la région de Rome au IIe siècle après JC. Belle et bien éduquée, les prétendants ne manquent pas ! Mais faire un beau mariage est la dernière de ses préoccupations. Elle veut consacrer sa vie au Christ et le dit au et fort… Ce qui n’est pas au goût de l’empereur romain Antonin le Pieux qui la convoque pour lui ordonner de mettre un terme à sa campagne d’évangélisation. On a beau être empereur, tout ne va pas toujours comme on veut : une fois face à elle, il tombe sous son charme et la demande en mariage. Le refus de Parascève signe le début de ses ennuis. Elle est enfermée et torturée mais semble protégée par sa foi. La curiosité autour de cette jeune martyre grandit alors. Pour se débarrasser d’elle une bonne fois pour toutes, elle est jetée dans une marmite d’huile bouillante. Le miracle arrive au bon moment ! Au lieu d’être ébouillantée, elle semble au contraire rafraîchie par le liquide en ébullition. Antonin s’approche pour constater de lui-même cette sorcellerie et c’est là qu’elle en profite pour lui asperger le visage d’huile chaude. Aveuglé, il la supplie de lui venir en aide. Pas rancunière pour un sou, elle accepte et lui rend immédiatement la vue. Antonin la libère mais elle sera de nouveau emprisonnée puis décapitée sous le règne de Marc Aurèle. 

En souvenir de la guérison miraculeuse de l’empereur Antonin, elle est depuis la Sainte protectrice des yeux. 

La Sainte Parascève est célébrée le 26 juillet dans les nombreux villages Grecs qui portent son nom, notamment celui qui se trouve dans la banlieue nord d’Athènes ou sur l’île d’Amorgos dans les Cyclades. Grandes tablées, processions et danses traditionnelles sont au programme !

* on me glisse à l’oreille que, comme beaucoup d’entre vous, elle profite du confinement pour faire le tri dans 19 siècles de tamatas reçus. 

Je vous souhaite à tous d’être protégé.e.s par
tous les Saints et les Saintes du monde !

Un tama maison pour finir me semble approprié 
😉

La Vasilopita / Η Βασιλόπιτα

Texte de l’association Phonie-Graphie que l’on remercie !

Les fêtes traditionnelles ont pour la plupart une origine paysanne, surtout dans une époque d’exode rural. Dans les campagnes, la « Vassilopita » se préparait à l’aube de la fête de Saint Basile c’est-à-dire le 1er janvier, le jour de l’An. En Grèce en effet c’est la Saint Basile (΄Αγιος Βασίλειος, Αï-Βασίλης) et non le Père-Noël qui apporte les étrennes aux enfants et qui donne son nom à la galette, la Vassilopita (Βασιλόπιτα). La tradition du pain festif se trouve déjà dans l’antiquité, culte de Déméter ou dédicace à d’autres dieux ou démons auxquels on l’offrait pour obtenir santé et puissance. De même, lors des Saturnales grecques ou romaines, une monnaie cachée dans un gâteau était signe de chance pour celui qui la trouvait et devenait le « roi de la fête » (Cf. Βασίλης-Βασιλιάς).

Les dates de fête de célébration des douze jours, de Noël à l’Epiphanie, sont très proches de celles de la période pré-chrétienne où les cieux de la chance s’ouvraient et où l’année changeait. Certes, les brioches paysannes consacrées au Christ et les petits pains en forme de couronnes que les bergers préparaient pour la Saint-Basile étaient déjà des porte-bonheur augurant santé et puissance pour la nouvelle année. Ils contenaient aussi une pièce de monnaie, signe de richesse pour celui qui la découvrait. La cérémonie elle-même avec son partage hiérarchique est peut-être venue avec les Croisés. On retrouve en effet des coutumes semblables chez les Français et les Belges dès le XIIIème siècle.

Outre son caractère de bon augure, la pièce de monnaie a également un sens magique et religieux comme l’or, l’argent et en général les couleurs brillantes qui conjurent de surcroît le mauvais sort. Dans la maison on la garde près des icônes.

Elle transmet sa qualité magique de fertilité et de bien-être au gâteau tout entier dont on lance des morceaux dans les champs et les vergers, tandis que les jeunes filles en placent sous leur oreiller pour voir en rêve leur futur fiancé.

Des récits concernant différentes provinces attestent d’une grande richesse cérémonielle. En Thrace orientale par exemple, où en plus de la pièce on joignait dans la pâte un grain de raisin, un grain de blé, un brin de paille pour les vaches, etc. Une autre explication issue des synaxaires, récits de la vie des saints, nous vient d’Asie Mineure. Alors que Saint Basile était évêque de la Césarée, le préfet de Cappadoce prit des mesures draconiennes pour percevoir les impôts. Epouvantés, les habitants rassemblèrent ce qu’ils avaient de plus précieux pour l’offrir au préfet. Radouci par ce geste, ce dernier refusa les présents et les invités s’en retournèrent tout joyeux. Mais comme il était difficile de restituer à chacun ses cadeaux dont beaucoup se ressemblaient, Saint Basile eut recours à une solution magique : il plaça les objets à l’intérieur de petits gâteaux qu’il distribua. Et – ô miracle – chacun retrouva ce qu’il avait offert.

Cette coutume de tirer les rois s’est répandue dans nombre de pays. Mais sans prendre l’ampleur qu’elle a en Grèce où, sortant du cadre familial, elle s’est étendue aux cercles socioprofessionnels.

Souhaitons qu’elle se maintienne et conserve son caractère populaire et traditionnel.

Du sucre plein les doigts

Les kourabiedes sont des biscuits préparés pour Noël à base de beurre, de farine, d’amandes et… beaucoup de sucre glace. 

Ils sont inspirés d’un gâteau truc, le kurabiye à base d’amande. Une preuve de plus que la culture du sucrée en Grèce doit beaucoup à leurs voisins-ennemis ottomans (comment vivrait-on sans baklava ?!). Devenus les biscuits traditionnels de Noël, ils sont souvent en forme de croissant et un clou de girofle peut être ajouté sur le dessus. Il représente le don des épices fait par les Rois Mages à Bethléem. 

En voici la recette :

INGREDIENTS

  • 500 g de beurre de brebis (à température ambiante) – ou de beurre de vache si vous n’en trouvez pas
  • 200 g d’amandes, émondées et grillées
  • 300 g de sucre glace
  • 650 g de farine
  • 30 ml de brandy (que l’on peut remplacer par du rhum ou de l’ouzo)
  • ½ cuillère à café d’essence de vanille

Pour le glaçage

  • 2 cuillères à soupe d’eau de fleur d’oranger (ou d’eau de rose)
  • 300 g de sucre glace

INSTRUCTIONS

  1. Blanchir, puis griller les amandes dans un four préchauffé à 180 degrés, pendant environ 20 minutes. Laisser refroidir, puis couper grossièrement en petits morceaux.
  2. Tamiser le sucre. Puis tamiser la farine séparément.
  3. Battre le beurre avec le sucre glace à vitesse lente jusqu’à incorporation, puis battre à vitesse rapide pendant dix minutes jusqu’à ce que le mélange devienne blanc et mousseux. Ajouter le brandy et la vanille et mélanger.
  4. Arrêter le mélangeur. Changer le crochet et attacher le crochet à pâte. Ajouter les amandes et continuer de mélanger. Ajouter la farine progressivement jusqu’à ce que la pâte soit molle mais non collante aux mains.
  5. Vous pouvez utiliser un emporte-pièce ou façonner les biscuits à la main en boules rondes ou croissants et les placer espacées, sur une plaque de cuisson recouverte de papier sulfurisé.
  6. Cuire au four pendant environ 12 minutes, selon votre four. Ils seront un peu mous, mais se raffermiront une fois refroidis.
  7. Retirer du four et laisser refroidir.
  8. A l’aide d’un pulvérisateur, vaporiser avec de l’eau de rose ou de fleur d’oranger sur les deux côtés des biscuits.
  9. Retourner les biscuits sur une surface sèche et en utilisant un tamis, saupoudrer de sucre glace. Retourner les biscuits à nouveau et continuer à saupoudrer jusqu’à ce qu’ils soient entièrement recouverts.

Sainte Paraskevi / Αγία Παρασκευή

Ce 26 juillet, les grecs fêtent la Saint Parascève, en grec Αγία Παρασκευή, littéralement Sainte Vendredi. 

Parascève naît dans la région de Rome au IIe siècle après JC. Belle et bien éduquée, Parascève a tout pour plaire mais faire un beau mariage est la dernière de ses préoccupations. Elle décide de consacrer sa vie au Christ, ce qui n’est pas au goût de l’empereur romain Antonin le Pieux qui la convoque pour lui ordonner de mettre un terme à sa campagne d’évangélisation. Mais rien ne se passe comme prévu : une fois face à elle, il tombe sous son charme et la demande en mariage. Le refus de Parascève signe le début de ses ennuis. Elle est enfermée et torturée mais semble protégée par sa foi et la curiosité autour de cette jeune martyre grandit. Pour se débarrasser d’elle une bonne fois pour toutes, elle est jetée dans une marmite d’huile bouillante. Le miracle arrive au bon moment ! Au lieu d’être ébouillantée, elle semble au contraire rafraîchie par le liquide en ébullition. Antonin s’approche pour constater de lui-même cette sorcellerie et c’est là qu’elle en profite pour lui asperger le visage d’huile chaude. Aveuglé, il la supplie de lui venir en aide. Pas rancunière pour un sou, elle accepte et lui rend immédiatement la vue. Antonin la libère mais elle sera de nouveau emprisonnée puis décapitée sous le règne de Marc Aurèle. 

En souvenir de la guérison miraculeuse de l’empereur Antonin, elle est depuis la Sainte protectrice des yeux. 

La Sainte Parascève est célébrée dans les nombreux villages grecs qui portent son nom, notamment celui qui se trouve dans la banlieue nord d’Athènes ou sur l’île d’Amorgos dans les Cyclades. Grandes tablées, processions et danses traditionnelles sont au programme. 

Paximadi (παξιμάδι), beaucoup plus que du pain dur

Le village d’Adravasti n’a beau compter qu’une grosse dizaine d’habitants, ses survivants n’ont pas renoncé à la magnifique tradition du paximadi (παξιμάδι). Une à deux fois par an, ils se réunissent et, sous la direction de Ririka, réalisent en grande quantité ce pain à base d’huile d’olive, de farine d’orge et de blé. 

Toute l’année, le paximadi se consomme dur et pour s’assurer de sa conservation, il est cuit deux fois dans l’imposant four à bois du village.

Les pains sont façonnés sous l’oeil vigilant de Ririka
Le four du village, Nikos à la manoeuvre
Après la première cuisson (à droite)
L’occasion de se retrouver toutes et tous
Toutes ces photos ont étés prises dans le mois dernier à Adravasti.
Merci Jean-Pierre et Pierre pour ce super reportage !

Ce pain doit son nom au crétois Pàxamos auteur de nombreux livres de recettes de cuisine au 1er siècle après JC !

Sous l’ère byzantine (IVème au XIIIème siècle), le nom de Pàxamos est synonyme de nourriture de qualité. Puis, au fil du temps, ce pain facile à réaliser devient l’ingrédient de base des populations des campagnes. Le paximadi est alors associé à la ruralité et même à la pauvreté. 

Sous l’occupation des vénitiens (1204-1669), on impose aux crétois de produire de très grandes quantités de paximadi pour nourrir la flotte de l’armée vénitienne. Il a même au sein de l’armée, une troupe dont la mission exclusive est d’acheminer le paximadi !

Dans les monastères, tandis que les moines ont droit au pain frais, les plus jeunes recrues doivent se contenter de paximadi. C’est aussi, avec les fruits, la seule nourriture tolérée pour les ermites. Pour ces raisons, les monastères crétois ont une grande tradition de fabrication du paximadi. Le monastère de Toplou, à quelques kilomètres de notre village, est encore aujourd’hui réputé pour la qualité de son pain dur. 

C’est ce pain que l’on utilise pour la recette du Dakos (ντακος) – le mezze typiquement crétois que ma soeur Léa voulait toujours commander au restaurant.

Et comme je suis là pour vous faire plaisir, en voici la recette (ULTRA simple ET délicieuse) 

  • Du paximadi (que vous pouvez remplacer par des biscottes suédoises ou du pain de campagne grillé)
  • Une grosse tomate bien mûre (dans quelques mois !) ou une boite de tomates concassées de bonne qualité
  • Un oignon nouveau émincé ou une petite moitié d’un oignon rouge émincé très finement (selon vos préférences)
  • Feta émiétée (au moins 3 cuillère à soupe – il n’y en a jamais trop !)
  • 1 cuillère à soupe de vinaigre (de cidre ou de vin)
  • 1 cuillère à soupe de miel 
  • Origan
  • Basilic frais
  • Quelques grosses olives noires 
  • et de l’huile d’olive !

Recette :

Couper la moitié de la tomate en cube et râper l’autre moitié. Dans un bol, mélanger : la tomate rapée, le vinaigre, le miel, le sel, le poivre, le basilic finement haché et l’origan. Corriger l’acidité ou le sucre à votre goût. Verser le mélange sur les pains et ajouter un bon filet d’huile d’olive. Ajouter la tomate hachée et l’oignon émincé puis la feta émiétée et enfin les olives dénoyautées. On peut aussi ajouter quelques câpres. Juste avant de servir, on rajoute un filet d’huile d’olive et un tour de moulin à poivre. 

Χρόνια πολλά μαμά!

La fête des mères est très fêtée en Grèce. D’abord liée au culte de Rhéa, elle est célébrée pendant les Ides de mars. Puis, sous influence orthodoxe, les grecs se mettent à la célébrer à travers la figure de Marie. La fête a alors lieu le 2 février, 40 jours après la naissance de Jésus. Ce n’est que dans les années 1960,  qu’elle est décalée au mois de mai, pour s’aligner aux pratiques occidentales. 

Terre cuite trouvée à Myrina, sur l’île de Limnos, représentant Déméter et sa fille Perséphone, -330 avant JC. 

Maternité et mythologie grecque

La figure de la mère est un thème développé dans sa complexité dans la mythologie grecque. Mais si presque toutes les divinités ont une progéniture, très peu d’entre elles leur accordent de l’attention…

L’instinct maternel d’Aphrodite, déesse de l’amour, n’est guère développé. Elle aura néanmoins une relation très complémentaire avec son fil Eros, dieu du désir, et c’est vis-à-vis d’Enée, Prince de Troie, son fils mortel, qu’elle se montre la plus protectrice : elle intervient dans la bataille, elle qui n’est pas guerrière, au risque de se blesser. 

Demeter, elle, porte sa maternité jusque quand son nom (Δη-μήτηρ). Mère célibataire, elle conçoit ses enfants hors mariage. Après le rapt de sa fille Perséphone par Hadès, le dieu des Enfers, elle part à sa recherche et délaisse les cultures. Pour mettre fin à la sécheresse et à la famine qui règnent soudainement sur Terre, Zeus trouve un compromis : Perséphone passera un tiers de l’année avec son mari aux Enfers, l’hiver, et le reste de l’année aux côtés de sa mère sur Terre. Ce que la mythologie nous apprend, c’est que la douleur d’une mère blessée peut la rendre terriblement puissante. 

Son opposé est probablement Héra, l’épouse de Zeus. Celle-ci représente bien plus l’union conjugale que la maternité. D’ailleurs, elle n’est guère féconde : ses enfants sont des divinités mineures (Hébé) ou ayant pas mal de problèmes avec elle (Héphaïstos). C’est avec d’autres épouses (Létô, Maïa, Dioné, Sémélé…) ou seul (pour Athéna) que Zeus engendre les grandes divinités. 
Héra tente, souvent en vain, de défendre les intérêts des enfants légitimes. Mais ce souci s’exprime bien plus dans son acharnement pour les enfants illégitimes que par sa sollicitude pour ses propres enfants. D’ailleurs, quand elle met au monde Héphaistos, fâchée d’avoir enfanté un être boiteux, elle le lance du haut du ciel ! Dans la mythologie, l’épouse et la mère ne se trouvent jamais dans la même personne… 

Plus tard, la religion orthodoxe, ne parvenant pas à s’émanciper tout à fait de la mythologie antique, tenta de réhabiliter Héra comme mère, protectrice du foyer. 

La feta / Η φέτα

En avril commence la saison de… la feta ! Même si cela ne se retrouve pas toujours dans nos habitudes et qu’il m’arrive d’acheter de la feta au supermarché au mois d’octobre, elle est produite entre janvier et mai et affinée trois mois minimum ce qui nous amène à une saison de dégustation d’avril à décembre. Pourquoi ? Tout simplement car le goût du fromage est étroitement lié à l’alimentation de la brebis. 

Quand je pense à la feta, je pense à l’épicerie de Βιβι, sur la place de Zakros. Chez elle, j’achète du pain, des biscuits γεμιστα et de surtout de la feta. Βιβι s’équipe d’un gant et plonge sa main dans le gros bidon. À Zakros, la feta s’achète à la coupe et a un goût puissant et acidulé. 

Si fiers quand il s’agit de leur patrimoine, les grecs ont mené une bataille juridique épique pour obtenir l’AOP et interdire donc ces “fetas” produites au Danemark à base de lait de vache. 

Quelques liens pour aller plus loin :

Où acheter de la bonne feta ?

Deux adresses à Paris : 

  • Le top se trouve chez Profil grec justement, 7 rue de Savies dans le 20ème
  • Pour ceux à la recherche du meilleur rapport qualité prix, l’épicerie méditerranéenne Épices et saveurs, 2 Avenue Parmentier dans le 11ème, a une super gamme pas très chère

La liberté ou la mort / Ελευθερία ή θάνατος

 

Le 25 mars 1821 commençait le long chemin vers l’indépendance grecque.

Après quatre siècles d’occupation ottomane, plusieurs sociétés secrètes, les Hétairies, se réunissent en Grèce et à l’étranger pour fomenter une insurrection. Leur objectif est clair : rendre à la Grèce son indépendance. La plus active d’entre elles, la Philiki Etairia, avec à sa tête l’évêque Germanos de Patras est à l’origine du grand soulèvement populaire qui durera près de dix ans.

Les grandes puissances européennes reconnaissent la création de l’État grec avec le Traité de Londres en février 1830 mais laissent en dehors de l’île de Crète, malgré sa participation aux insurrections et la volonté affichée des insurgés crétois de rejoindre le nouvel État. Pour des raisons géopolitiques, les crétois devront attendre plus de quatre-vingt ans pour que la Crète soit officiellement rattachée à la Grèce en 1913.

« La liberté ou la mort » est la devise des insurgés. C’est elle qui se cache derrière le drapeau grec : chacune des neuf syllabes correspond à une des neufs bandes blanches et bleues.

Le 25 mars est un des deux jours férié en Grèce. Au défilé militaire à Athènes se joint celui des enfants en costumes dans toutes les villes et les villages.

Lundi dernier à Sitia, notre producteur Manolis a participé au défilé et à la danse traditionnelle : C’est le danseur à droite sur la photo !

Martis, Μάρτης

 

Le Martis (Μαρτης) est un joli bracelet rouge et blanc que les enfants grecs portent tout le mois de mars afin de protéger leur visage des premiers rayons du soleil. Le dernier jour du mois, ou dès la première hirondelle, ils retirent le Martis pour le laisser sur un arbre fruitier. Il aiderait les oiseaux à faire leur nid.

Nikolaos Politis, pionnier de l’étude des folklores grecs, lie cette coutume aux origines mystérieuses au mythe de Déméter, la déesse de la terre.

Quand Perséphone est enlevée par Hadès, le roi des enfers, sa mère Déméter, désespérée, part à sa recherche et délaisse les cultures. Elle arrive déguisée en mendiante dans la ville d’Éleusis, près d’Athènes. Malgré son apparence modeste, le roi Céléos la reçoit avec respect et lui offre du vin et du fromage. Pour le remercier, elle lui enseigne l’art de l’agriculture et l’initie à ses “Mystères”. C’est  le point de départ d’une tradition, les fameux Mystères d’Éléusis, qui devient une des fêtes les plus célèbres et énigmatiques de la Grèce antique. Castors & Pollux, les fondateurs de Rome, ou encore le philosophe Hippocrate auraient fait partie des initiés.

On sait peu de choses des rituels respectés au cours de cette fête hormis que ses initiés portaient un bracelet rouge et blanc à leur main droite…

Dès le Vème siècle, l’Église Chrétienne considère la coutume du Martis comme idolâtre et l’interdit. Pourtant, encore aujourd’hui, la tradition est respectée partout dans les Balkans.

La blanc pur et le rouge joyeux s’associent pour fêter le printemps. La petite perle symbolisant un oeil veille sur les enfants.

Vous pourrez aussi en trouver dans mon épicerie crétoise. Ils sont réalisés à la main par Alexandra à Athènes.

Ses bracelets s’adaptent aux poignets des enfants comme des adultes et personne ne vous en voudra si vous décidez de ne pas en faire profiter les hirondelles et de le porter toute l’année !

L’idée de vous proposer ces Martis est née d’une collaboration avec Corinne, créatrice de My Greek Family. J’aurai l’occasion de vous reparler d’elle dans quelques mois puisque nous avons décidé d’organiser ensemble la 4ème édition du pop-up store “Comme un été en Grèce” qui réunit des artisans, créateurs, producteurs et même des écrivains.

το πανηγύρι / La fête du village

Tout l’été, les villages grecs vivent au rythme des « Panagia ». Depuis deux ans, notre village d’Adravasti est également au rendez-vous à l’occasion de la Saint Dimitri le 29 juillet. Alors que le village se vide peu à peu de ses dernier habitants, comme un pied de nez au destin, le village s’est doté d’une association dont la charge principale est de présider aux préparatifs de la fête. Et cette année pas moins de 200 personnes, habitants des villages alentour et quelques touristes, sont venues pour manger, boire et danser.

La semaine qui précède, les rues sont nettoyées, les maisons chaulées, les affiches annonçant le nom du musicien et de son groupe accolées aux poteaux électriques. Le grand jour, tout le monde est à son poste, impressionnant d’énergie et d’efficacité. Dans les coulisses, les femmes préparent à la chaine les assiettes de mezze. Le four à pain dans lequel sera cuit l’agneau chauffe. Une troupe de jeunes danseurs en costumes attendent leur tour dans un coin. Le chanteur et ses musiciens sont déjà sur l’estrade. Les voitures commencent à s’accumuler à l’entrée et à la sortie du village.

En Crète, la recette d’une fête réussie est toujours la même : un menu sans surprise – mezze, agneau et pommes de terre au four, sucreries au miel -, des danses crétoises qui réunissent les jeunes et les vieux, une loterie dont tous les tickets sont gagnants et beaucoup de raki. Folklore bien rôdé? Plutôt une leçon de vie en communauté insulaire soudée qui garde une profonde cohésion.

Petit reportage photo d’un jour pas comme les autres.

 

 

La salade grecque / Χωριάτικη σαλάτα

En Grèce, il y a une chose avec laquelle on ne rigole pas : les ingrédients de la χωριάτικη, la salade grecque ou litteralement la salade du village (χωριό en grec).

  • Tomates
  • Concombre
  • Oignon
  • Poivron
  • Origan
  • Feta
  • Olives noires
  • Huile d’olive

Quand la feta a du goût, les tomates sont bien mûres et l’huile d’olive abondante, c’est un vrai délice. Et quand on la mange à l’ombre de notre accacia dans notre χωριό, Adravasti, c’est presque le paradis.